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L’Entente cordiale

L’entente cordiale – France Angleterre de 1815 à nos jours.

par

Robert MOSNIER (21ème fauteuil)

            Depuis 1815 la lutte fratricide entre les deux nations a laissé place à une amitié non dépourvue  d’équivoque mais animée par des intérêts communs.

Peuple de marins, industrieux et commerçants dominant les mers les anglais, peuple d’agriculteurs  attachés à la richesse foncière, les français. Les deux pays sont complémentaires et ont cherché à fusionner, la dernière tentative avortée remonte à la débâcle de 1940 où Winston Churchill et Paul Raynaud envisageaient de rassembler les deux empires coloniaux dans leur lutte contre l’Allemagne nazie.

Mais revenons à cette nuit du 17 au 18 juin 1815.

L’orage gronde du côté du Mont Saint Jean à quelques lieux de Bruxelles. Des trombes d’eau s’abattent, le terrain est détrempé. Les hommes engoncés dans leurs uniformes se blottissent les uns contre les autres recherchant chaleur et réconfort, car demain le choc des titans va décider du sort de l’Europe.

Pendant ce temps à Bruxelles, au bal de la duchesse de Richmond, les jeunes officiers anglais dansent … Wellington, le chef de l’armée anglaise, les regarde avec tendresse et compassion, sanglés dans leur uniforme rouge. Combien d’entre eux baigneront dans leur sang, le lendemain. Il est 3 heures « Allons, Messieurs, dit le généralissime, rejoignez vos cantonnements ».

Le sol est boueux dans cette plaine ondulante et vallonnée où les charges des cuirassiers se brisent sur les carrés anglais.  Hougoumont, la Haye Sainte, la Belle Alliance, ces fermes transformées en redoutes seront prises et reprises.

Le soir tombe, l’armée anglaise est prête à s’effondrer quand survient l’armée prussienne mal poursuivie par les troupes de Grouchy qui n’a su marcher au canon.

C’est la panique, les Français refluent en désordre sur Genappe. La garde impériale meurt en protégeant la retraite ou plutôt la déroute. quatre jours plus tard ,le 22 juin Napoléon abdique pour la seconde et dernière fois.

Au congrès de Vienne 1814-1835 sous l’égide du chancelier autrichien Metternich, les empereurs et rois se partagent la carte de l’Europe. Il faut mettre fin aux idées pernicieuses de la Révolution, le pouvoir du peuple sur les monarchies diverses, le principe des nationalités. Alexandre Ier tsar de toutes les Russies, invente la Sainte Alliance. Tout roi détrôné doit être remis sur son trône par une coalition, l’on ne peut imposer une constitution libérale.

Deux principes vont animer cette partie du XIXe siècle, les idées libérales  Espagne, France et les idées légitimes, alliance du trône et de l’autel reposant sur un certain corporatisme où chacun doit rester à sa place. Le libéralisme finira par triompher en 1830, prudemment, puis en 1848, totalement.

Revenons à la politique anglaise sur le continent, elle est simple, maintenir par un jeu d’alliances, un équilibre des nations européennes, s’allier à la plus faible pour contrer l’Allemagne, l’Autriche ou la Russie qui voudrait s’arroger une quelconque supériorité.

Vis à vis de la Russie, interdire son accès aux mers chaudes. L’ambition des tsars est de prendre Constantinople, débouché en Méditerranée où l’Angleterre contrôle Gibraltar (1704), Malte (1803) et Chypre, fin XIX ème siècle, sur la route de l’Égypte et des Indes, stopper son expansion dans le Caucase et surtout vers l’océan Indien par l’Iran et l’Afghanistan d’où des guerres perdues des deux nations dans ce pays du nord des Indes tout au long du XIXe siècle.

Vis à vis de l’Allemagne, maintenir un équilibre entre Prusse qui  domine les états du nord et l’Autriche proche de la Bavière, Wurtemberg et Bade; contrer les manoeuvres de l’Autriche comme pour la Russie, vis à vis de l’enfant malade de l’Europe, l’empire ottoman.

L’Italie partagée entre Bourbons et Habsbourg Autrichiens et qui ne trouvera son unité qu’en 1860-1867 et 1870  n’est pas une menace.

L’Espagne qui perd ses colonies 1810-1825 est exsangue et s’enferme dans des guerres civiles.

La France libérée des armées étrangères de 1818 a perdu ses forteresses du nord en 1815, ce qui lui restait de la Savoie , le pays aspire à la paix, à retrouver sa prospérité.

Les grecs en rébellion contre le pouvoir ottoman ne seront défendus par les puissances alliées que lorsque la répression (massacres de Chio) sera trop vive.

Ce sera la guerre d’Espagne de Chateaubriand, promenade militaire pour rétablir Ferdinand VII, prisonnier des libéraux, sur son trône. L’intervention maritime pour soulager la Grèce et surtout la prise d’Alger  le 5 juillet 1830 . Cette expédition mécontente l’Angleterre mais la révolution de 1830, les gages donnés par Louis Philippe, le refus de ce dernier à la naissance de la Belgique révoltée contre les Pays Bas d’ accepter du jeune royaume son second fils le duc de Nemours comme roi, permet d’éviter une confrontation.

La conquête de l’Algérie durera avec les révolutions kabyles jusqu’en 1857. Napoléon III, en avance sur son temps, prônait une nation arabe, autonome, c’était aller à l’encontre des mentalités européennes de l’époque, des colons s’appropriant le pays s’appuyant sur une élite , en particulier, juive. L’amendement Crémieux devait donner à ces derniers le titre de citoyens français.

En 1840, malgré les atermoiements de Louis Philippe,  une guerre voulue par Adolphe Thiers  faillit éclater entre les deux nations et ce malgré le retour des Cendres, Napoléon rendu par l’Angleterre repose auprès de la Seine aux Invalides. L’enjeu était le conflit Égypte- ottoman. Nous soutenions les premiers, les anglais les turcs; Louis Philippe renvoie Thiers le remplace par Guizot dont l’immobilisme allait provoquer la Révolution de 1848 ensanglantant l’Europe, arrachant aux monarchies une constitution plus ou moins libérale.

C’est dans les années 1840 que la jeune reine Victoria 1837-1901 vint en visite officielle à Paris reçue par le roi Louis Philippe et la reine Marie Amélie. Les désaccords entre les deux pays furent aplanis et la première entente cordiale scellée.

L’on doit cependant au génie de Napoléon III, prince président (1848-1851) puis Empereur des français (1852-1870) d’avoir fortifié et rendu pérenne cette entente. Songer que le neveu de Napoléon Ier , anglophile, soucieux de salubrité et d’hygiène publique, saint simonien qui avait beaucoup appris de la révolution industrielle anglaise allait tenter la même expérience en France. Il avait bien connu l’Angleterre où il devait terminer sa vie après l’échec de Sedan, il y repose toujours… Ce fut notre alliance au cours de la guerre de Crimée, l’Angleterre défendant ses intérêts commerciaux menacés par l’expansionnisme russe qui convoitait Istanbul et l’entrée des mers chaudes. La France, désireuse du maintien de ses droits en matière culturelle et religieuse et protectrice des minorités opprimées,le début de la campagne du Mexique avec l’Espagne mais les anglais se retirent après avoir obtenu satisfaction du remboursement de leur dette.

En 1860, lors de la seconde guerre de l’Opium, anglais et français prennent Pékin, détruisent le Palais d’été, deux siècles d’humiliation de la Chine qui ne manque pas à ce jour de nous le reprocher.

Pour autant en 1870, ni l’Italie où nous avions maintenu un corps expéditionnaire pour défendre les états du pape, ni l’Angleterre ne nous soutiennent. Après la défaite, l’empire allemand est proclamé à Versailles dans la galerie des glaces. Princes et rois acclament Guillaume Ier, roi de Prusse comme Empereur allemand.

En 1871 trois départements d’Alsace Lorraine nous sont enlevés. Ils animeront l’esprit de la revanche entretenue par un nationalisme qui nous paraît aujourd’hui outrancier soutenu par ces hussards noirs de la république que sont les instituteurs.

La république est proclamée le 4 septembre 1870 mais l’Assemblée issue de la guerre est en grande majorité royaliste. Pendant cinq ans, on pense la Restauration possible, les partis légitimistes et orléanistes s’étant réconciliés mais la personnalité du comte de Chambord, petit-fils de Charles X ne permettra pas l’évolution de la France vers une monarchie constitutionnelle…. 1875, l’amendement Wallon fonde la IIIe République.

Celle-ci est bien seule dans un environnement hostile. Sur le plan extérieur, la France est isolée, elle va le rester une vingtaine d’années. Seule République dans un environnement monarchique, elle représente tous les maux, instabilité politique, parlementarisme qui sape le pouvoir et n’autorise l’arbitrage, scandales financiers, corruption, misère de la population ouvrière qui s’ouvre au socialisme marxiste ou guesdiste, période d’essor économique ponctué de crises paroxystiques, recherche de nouveaux marchés qui amène au colonialisme voulu par la gauche.

N’appelle-on-pas Jules Ferry avec dérision le « Tonkinois ». Seule la monnaie demeure jusqu’en 1914 ferme permettant à la bourgeoisie le maintien de ses rentes.

La France amuse ou scandalise l’Europe mais Bismarck, le chancelier du Reich la maintient dans un isolement diplomatique favorisant cependant  son expansion coloniale ne serait-ce que pour agacer ou irriter l’Angleterre.

Mais l’Europe danse sur un volcan alimenté par l’affaire des Balkans, l’enfant malade du continent est l’empire ottoman qui se disloque et se morcelle.

Après l’Algérie, la France en compétition avec l’Italie lui ravit la Tunisie,1881. L’Italie en 1911 acquiert la Tripolitaine alors que l’Angleterre, maîtresse du Canal de Suez établit avec l’Egypte une alliance, sorte de protectorat qui lui permet de s’avancer vers le Soudan, mais c’est dans les Balkans que  l’agitation est au maximum, la Bulgarie et la Serbie sont proches des russes.

En 1878 au Traité de Berlin, Bismarck réconcilie l’Autriche Hongrie et la Russie, réconciliation de façade tant les antagonismes sont profonds, l’Autriche assure un protectorat sur la Bosnie Herzégovine avant de l’annexer peu avant 1914, prélude à la Grande Guerre suite à l’assassinat du grand duc héritier François Ferdinand.

La Russie se détache de l’alliance des trois empereurs. En proie à la guerre civile, aux manifestations de masse elle cherche à s’industrialiser, à développer ses transports. Ce vieux pays engoncé dans ses traditions, à peine sorti de la féodalité a besoin d’argent frais pour développer ses infrastructures.

Marianne se révèlera très généreuse, l’alliance se fera suite aux visites d’escadrons, aux fraternisations de marin, militaire puis diplomatique, elle sera enfin politique. Alexandre III pour qui la république est abjecte fait preuve de lucidité et ce sont les emprunts russes, de funeste mémoire, qui industrialise l’empire des glaces. Les visites se succèdent en 1893 l’alliance est établie, elle sera renforcée par la personnalité de Nicolas II qui arme la France et se portera à son secours en 1914.

L’Italie rejoint les empires centraux, c’est la triplice, elle nous en veut du fait de la Tunisie mais les intérêts italiens tant commerciaux que territoriaux sont en contradiction et en 1916 elle rentrera  en guerre à nos côtés.

Cette dernière décennie du XIXe siècle voit notre antagonisme avec Albion s’aggraver. C’est l’affaire de Fachoda et le corps expéditionnaire du capitaine Marchand doit se retirer du Soudan où une flottille britannique remontant le Nil s’apprête à l’attaquer.

Le coq gaulois est blessé par la rose. Les deux nations sont au bord de la guerre. Deux hommes vont empêcher le conflit. Le futur roi d’Angleterre Edouard VII (1901-1910) francophile et parisien et Delcassé, ministre des Affaires étrangères. Alors l’Angleterre sera à nos côtés contre l’Allemagne en cette orée du XXe siècle où l’affaire du Maroc risque d’entraîner un nouveau conflit. Le gouvernement du roi Edouard VII nous soutient lors de la conférence d’Algésiras et les sphères d’influence au Maroc sont partagées entre  l’Espagne et la France, cette dernière en 1911 avec Lyautey assurant son protectorat sur le royaume Chérifien.

En 1904, l’entente cordiale entre la France et l’Angleterre consacre les efforts des deux peuples et la diplomatie visent à ménager les conflits entre la Russie et la Grande Bretagne dont l’influence est partagée en Iran et le Turkistan russe séparé de l’Inde anglaise par les glacis de l’Afghanistan.

L’Angleterre voit d’un mauvais œil  le réarmement de l’Allemagne qui se dote d’une flotte de  guerre puissante, dont l’armée se renforce, c’est la course aux armements qui aboutit au conflit mondial de 1914. Guerre de mouvements puis guerre de tranchées laissent les deux pays vainqueurs mais exsangues, la France, particulièrement meurtrie dans sa chaire à la démographie déclinante, dont les zones industrielles Nord et Est ont été particulièrement touchées, doit faire face à une dette énorme et à des révoltes sporadiques.

Quant à l’Europe, deux crises économiques, des révolutions suite à l’émancipation des peuples et au triomphe du communisme en Russie maintiennent l’instabilité et favorisent le fascisme.

C’est que le Traité de Versailles porte en germe la seconde guerre mondiale. L’Allemagne a déposé les armes mais son territoire n’a pas été envahi. Elle se sent particulièrement humiliée, la revanche est en marche, la montée de l’hitlérisme en est la conséquence. L’Autriche Hongrie a implosé, c’est le principe des nationalités avec des exceptions, la Croatie est donnée à la Serbie ainsi que le Montenegro, pourtant notre allié. La Slovaquie partage les destins de la Tchéquie. La Pologne renaît après un siècle et demi de despotisme. La Finlande intégrée à la Russie en 1809  recouvre sa liberté ainsi que les provinces baltes.

Devant ce morcellement, l’Angleterre se confine dans son isolement ne soutenant pas son ancien allié qui va occuper la Rurh et la Belgique pour non paiement de la dette de l’Allemagne. En 1935, lors de la réinstallation de l’armée d’Hitler sur la rive gauche du Rhin, les alliés protesteront mais ne feront rien.

Vingt ans, une génération sépare les deux conflits. La Der des Der ainsi appelle-t-on la première guerre mondiale, ne laisse qu’amertume, regrets et des peuples désabusés qui ont dû faire face aussi à la spéculation venue d’outre Atlantique, à la grande crise financière économique de 1929 qui impose aux États Unis sous Roosevelt, un new deal et qui arrive en France en 1932 et jette l’Allemagne dans les bras d’Hitler. Mussolini qui s’est emparé en Italie du pouvoir en 1922, alliée de la France et de l’Angleterre s’aliène ces deux nations lors de la guerre d’Éthiopie. La S.D.N., ancêtre de l’O.N.U. Condamne l’agression de l’Italie depuis l’Érythrée, sur le seul pays africain qui n’a jamais été colonisé. Alors l’Italie se rapproche de l’Allemagne et avec le Japon qui après la Corée, la Mandchourie convoitait la Chine en proie à la guerre civile forme l’axe Berlin-Rome-Tokyo.

La seconde guerre mondiale s’apprête 1939-1945. La France envahie n’aura plus droit au chapitre des grandes puissances…

Roosevelt se méfie de de Gaulle, Churchill soutient ce dernier contre Staline et le 7 mai 1945 à Reims puis le 8 mai à Berlin, la France signera l’armistice.

Nous arrivons à l’époque contemporaine, celle de la décolonisation réussie en Angleterre où le Commonwealth maintient des liens économiques, commerciaux et culturels, plus ardue en France

1945-1962 où le centralisme jacobin vis à vis des peuples aux langues et cultures différentes et minorées sera l’objet de conflits.

Quelques hommes vont créer l’Europe. Les français Jean Monnet et Robert Schuman, l’italien Alcide de Gasperi, l’allemand Konrad Adenauer. Communauté économique de la CECA puis du Marché Commun Traité de Rome en 1956. L a dynamique du couple Franco Allemand malgré de nombreuses vicissitudes en sera le moteur.

L’Angleterre se méfie de cette entité à visée politique, elle préfère le libre échange, la diminution des barrières douanières et l’instaure avec sept états qui enserrent les six du Marché Commun; c’est un échec. Mac Millan, le Premier ministre conservateur s’en approche mais De Gaulle (1959-1969) s’y oppose, car le Royaume Uni est partagé entre un continent et le grand large, son amitié séculaire , depuis 1815, avec les Etats Unis, l’hégémonie de sa langue. Il l’intègre  cependant en 1972 mais demeure rétif à la P.A.C. et n’a pas accepté l’union monétaire : l’euro.

Aujourd’hui l’Europe est en construction, la multiplicité des langues, l’inconscient collectif, l’histoire, le communautarisme ou l’intégration, le choc des religions, des civilisations, l’impact démographique sont des enjeux d’actualité. La Chine, l’Inde, la Russie, le Brésil, l’Afrique du Sud même ont une croissance qu’on leur envie. Mais l’Europe ne saurait exister sans le Royaume Uni. Celui-ci n’est plus une île depuis l’euro tunnel . Arrimé au continent, l’amitié Franco Britannique traverse les ruptures et les malentendus.

l’ANFB

L’Association Nationale Franco-Britannique

par

Robert MOSNIER  (21ème fauteuil)

Il en est de ces activités mémorielles qui consacrent au delà du souvenir la permanence d’une amitié entre les peuples.

Ce n’est cependant pas sans controverse, oubli passager ou rivalité latente, orientation que saisit dans la confrontation ou l’éloignement un mouvement parfois inverse traversé de contradictions, pertes ou séparations douloureuses, le Brexit en est l’illustration, la Grande-Bretagne regarde vers le large, rompt ses amarres avec l’Europe mais conserve l’essentiel, l’âme complémentaire de nos deux peuples.

L’association nationale Franco-Britannique, née de la Grande Guerre, voulue par la Reine-Mère Élisabeth et le Président Lebrun consacre le sacrifice perpétré par nos deux nations engagées après les deux guerres mondiales dans des conflits post coloniaux tels:l’affaire de Suez en 1956 , ou actuels dans la lutte anti-terroriste, Irak , Afghanistan….

Nous sommes dépositaires de la mémoire des combattants dont le courage et l’abnégation   nous rendent responsables du maintien de la paix,afin de  prévenir et éviter les conflits que la folie des hommes peut à nouveau engendrer.

Le risque des rapports dysharmonieux entre Nations est  cette blessure qui génère orgueil, cupidité et toute puissance, le conflit de 14 dans sa course folle aux armements, la recherche de débouchés commerciaux précipita dans l’horreur les états Européens ,chacun voulant s’arroger la primauté.

L’idéologie et l’esprit de système, dévoyés par le racisme au caractère haineux occupent la seconde guerre et son cortège de martyrs, puis la lente et progressive liberté des peuples à l’histoire parfois dérobée, à la culture refoulée qui expriment aujourd’hui leur amertume entre anachronisme et vengeance ,rend précaire la Paix entre les hommes.

Ces jeunes gens appelés à la mort à la fleur de l’âge suscitent notre respect et nous engagent à nous éloigner de toute dominance et crainte mortifère et à accomplir cette liberté de l’union entre les peuples.

Conférences, expositions, colloques, rencontres et partages, commémorations aux monuments aux morts resserrent les liens qui nous unissent et le prix du sacrifice de nos aïeux nous renvoie à cette liberté qui leur fut confisquée.

Il ne s’agit nullement de nostalgie, d’un inventaire qui n’aurait lieu d’être mais d’un parcours toujours actuel, ce combat d’une paix fragile à surveiller et consolider.

L’ A.N.F.B. représente l’avenir, celui de la complémentarité entre deux Nations, dont l’histoire enchevêtrée est force si union, désolation si faiblesse.

Téléo

Vue sur Téléo, le téléphérique urbain toulousain

par

Michel CARRIER  (33ème fauteuil)

Quelques privilégiés habitant le sud-est toulousain ont pu et peuvent suivre la mise en place du téléphérique urbain TELEO.

C’est un chantier de 82 millions d’euros dont on a pu voir l’évolution (contrariée par le Coronavirus) avec l’implantation de 7 pylônes supports et de trois stations :

  • la station Université Paul Sabatier reliée au terminal de la ligne B du métro
  • la station Rangueil « Louis Lareng » (fondateur du SAMU et de la télémédecine)
  • la station Oncopole  « Lise Enjalbert » (grande virologue de la faculté de médecine de Toulouse).

La station Paul Sabatier paraît fort importante mais c’est ici que sont regroupés les moteurs permettant le fonctionnement du téléphérique ainsi que le garage.

Cet ouvrage remarquable réalisé par la société POMA dotera Toulouse du plus long téléphérique urbain d’Europe : 3 km avec passage de la colline de Pech David et de la Garonne.

Nous avons également pu assister à la pose de la cablette (corde qui sert à la mise en place des câbles).  C’est un hélicoptère qui a été chargé de cette tâche entre l’Oncopole et Rangueil puis un drone entre Rangueil et Paul Sabatier.

Actuellement le chantier poursuit son avancée et nous attendons avec impatience de voir la première cabine circuler pour les essais.

Au final il devrait y avoir 15 cabines pouvant transporter 35 personnes chacune à une vitesse de 20 km/h soit 10 mn pour un trajet de Paul Sabatier à l’Oncopole. Il  paraît même que les vélos seront admis dans les cabines ! Aux heures d’affluence la fréquence de passage devrait être celle du métro (2 mn).

Espérons seulement que le vent d’autan, habitué de notre ville, ne s’opposera pas violemment à ce bon fonctionnement. L’arrêt de ce téléphérique n’est prévu qu’à partir d’un vent de 108 km/h. Pour ceux qui scrutent la météo marine cela correspond à un vent de 58 nœuds soit force 11 en degré Beaufort : violente tempête. Soyons rassurés, les statistiques de météo France nous indiquent que cela n’arrive que 2h30mn par an à Toulouse… et il n’est pas exclu que cela se passe pendant l’arrêt nocturne du téléphérique.

Même si nous n’avons pas envie de fréquenter l’hôpital de Rangueil ou l’Oncopole, gageons que dès la mise en fonction de ce Téléo, de très nombreux curieux iront faire un essai pour admirer le point de vue qui devrait être grandiose.

Photographies de l’auteur

Les pylônes préfabriqués en usine ont été mis en place au moyen de grues fortement dimensionnées. Il s’agissait de lever des monstres de 350 tonnes et 60 m de haut culminant une fois montés à 80 m.

Processus sociétaux et COVID-19

Processus sociétaux et COVID-19

par

Robert MOSNIER   21ème fauteuil

En matière de mœurs, l’accélération des processus sociétaux, les raccourcis et confusions établis compromettent le positionnement des personnes troublées dans leur identité .

Cela influe sur les mentalités en les radicalisant ou les exposant à des conduites de fuite.

La perte ou la distanciation des repères induit une ambivalence, contradiction qui modifie profondément  les convictions éthiques.

Un effet de bascule s’installe, les cadres disparaissent, la parole est perçue passagère, la profondeur s’estompe, l’humeur variable triomphe.

Il en est ainsi du paradoxe de la vie, sa dignité, sa grandeur, son maintien coexistent avec la destruction de son potentiel programmé : l’embryon.

Ces deux facettes s’opposent et font appel à des tendances profondément ancrées dans nos sociétés, le débordement d’une démographie non maîtrisée, génératrice de misères et de violences compromettrait le climat et les écosystèmes appelant d’autres rapports de force, la fuite des populations, la destruction de terroirs, la terreur et la guerre..

Ces peurs analogiques débordent nos phantasmes, engendrent des conduites mortifères et détournent de l’essentiel, l’espoir en l’humanité !

Un simple grain de sable, en l’occurrence le coronavirus planétaire précipite la décompensation…

Un rationalisme morbide apparaît entre dépression et persécution, asservissement ou déni, s’ensuit une interrogation complotiste, source de délation ou renoncement à tout épanouissement.

La tentation trans-humaniste de l’homme augmenté se heurte à cet invisible organisme qui modifie en profondeur nos conduites et nos comportements, amenant sidération et repli.

Les systèmes économiques sont désorientés, ceux politiques changent d’objet et de méthode le libéralisme disparaît derrière le social, le travail se raréfie et les postures dévoilent un monde à plusieurs vitesses avec un regard contrasté envers les producteurs de richesse et les consommateurs dont le pouvoir d’achat émoussé bénéficie d’aides exceptionnelles qui deviennent conventionnelles. Les artifices nécessaires pour empêcher un trop grand déséquilibre et maintenir la tête hors de l’eau des entreprises comme des simples citoyens ne sauraient se perpétrer dans la durée.

Le contact à distance, la relation remaniée quittent les apparences, les rapports plus intériorisés rappellent notre fragilité comme notre besoin collectif d’être et faire société au delà de nos manques et du vide qui agresse.

Cependant la solitude des laissés pour compte, accidentés de la vie, éternels perdants ou solliciteurs impénitents nous apparaît avec force. Ils expriment au delà de leurs besoins leur humanité blessée, trahie ou bafouée. La masse des pauvres qui ne cesse de grandir leur donne une visibilité que nous ne pouvons ignorer mais qui amplifie nos propres inquiétudes et sollicite de nouveaux défis.

L’essentiel est ce besoin de tendresse, ce changement de notre regard sur une proximité que l’on croit dangereuse entraînée par nos divergences de perception et de culture et du malaise occasionné en retour.

Il résulte de cette pandémie planétaire une fluctuation, doute envers le sérieux des scientifiques, appuyé sur leurs courbes et leurs modèles et l’innocence doublée du désarroi de nos concitoyens.

Faut-il évacuer ou contrôler nos émotions sous la chape de la culpabilité et du manque entretenus s’interroger sur notre responsabilité individuelle et collective?

La vie sera t-elle poursuite d’une liberté asservie, esclavage d’un monde robotisé entre les sachants, les aidants et les autres voués à consommer et se taire!

Cette perspective lancinante qui consiste en l’absence d’un avenir à visage humain nous conditionne et exacerbe nos doutes, neutralise les naissances, perturbe nos choix.

Cette finitude annoncée est ce cancer qui nous ronge oublieux de l’essentiel…

Profitons de cette intériorité pour fuir nos apparences d’une prétendue réussite et qui ne serait que réparation éphémère, retrouvons l’essentiel du don libre et non partage imposé…

C’est notre propre révolution de l’ être dépassant le savoir et le faire!

Les Druides

Les Druides

par Longin FOURDRINIER (8ème fauteuil)

Dès l’école primaire, mes instituteurs me parlaient des druides en cours d’histoire sur la Gaule.

Au lycée, mon professeur d’histoire évoquait, en 6ème, l’image du druide chez les gaulois cueillant le gui sur le chêne dans la forêt. Puis j’ai découvert en versions latines les textes de Jules César sur les druides dans « La Guerre des Gaules ».

En 1ère, j’ai dû lire « Les martyrs » de Chateaubriand pour découvrir la rencontre d’Eudore chrétien commandant des armées armoricaines sous Dioclétien et la druidesse gauloise Velleda s’aimant jusqu’à la mort.

Mais j’ai été beaucoup plus marqué, il y a fort longtemps, par l’opéra de Bellini « Norma » créé à la Scala de Milan en 1831. L’air de « Casta diva » interprété par la Callas me donne toujours de grandes émotions. Norma, druidesse, aime Pollione proconsul de la Gaule, lequel aime Adalgyse, vierge du temple. Norma s’accuse de la faute de Pollione qui a essayé d’enlever Adalgyse. Il rejoint Norma, condamnée à mort par son père le grand prêtre Orovese, sur le bûcher. C’est un sacrifice humain qui se transforme en double suicide et donne quelques indications sur les lois des druides.

Il était donc tout naturel pour moi de comprendre qui étaient ces druides de l’histoire de la Gaule et savoir ce qu’ils sont devenus.

Les sources littéraires sont très nombreuses. Deux types de sources permettent d’aborder le thème des druides et du druidisme.

Dans la première catégorie, je citerai Poseidonios d’Apamée (135-51 av.J-C), philosophe grec qui a voyagé dans toute la Gaule 40 ans avant Jules César. Il était directeur de l’Ecole du Portique, astronome, géomètre, géographe et historien. Il a été une source très importante pour Jules César dans « La Guerre des Gaules ». Certaines hypothèses lui prêtent également la conception de la machine d’Anticythère. Nous pouvons également retenir Lucain, Suetone, Pline l’Ancien, Ciceron, Tacite…

Une deuxième source complète la première avec une origine différente: ce sont des textes irlandais du VIII ème au XV ème siècles.

Ce décalage chronologique et géographique entre sources continentales et insulaires semble poser des problèmes d’interprétation à certains auteurs.

Jean-Louis Brunaux, historien et archéologue du CNRS écarte les sources irlandaises. Il considère comme seules crédibles les auteurs grecs et latins. Mais l’isolement de l’Irlande aurait permis de conserver la tradition alors que le continent subissait les bouleversements des invasions barbares.

Je vais tenter de traiter ce sujet très vaste en évoquant l’origine des druides et du druidisme, leur rôle dans la société celtique, leur évolution et disparition.

Puis j’aborderai le néo-druidisme. Quelle est sa crédibilité par rapport aux textes anciens?

Je terminerai en évoquant le néo-druidisme et la franc-maçonnerie du XVIII ème siècle à l’époque contemporaine, ce qui ne manquera pas d’en surprendre certains quant à la crédibilité de certaines théories.

Il faut noter un intérêt naissant depuis une soixantaine d’années pour l’histoire du druidisme.

Il existe plusieurs thèses sur l’émergence de l’institution des druides:

    • une origine fondamentale et spécifique de la civilisation celtique.
    • une origine pré-celtique issue du néolithique.
    • une création tardive des derniers siècles du premier millénaire av. J-C avec l’apparition d’intellectuels, notamment de savants versés en astronomie, sur le  pourtour méditerranéen .

Les celtes se sont établis en Europe Occidentale au début du premier millénaire av. J-C.
Les bretons étaient les celtes de Bretagne, c’est à dire la Grande Bretagne (Angleterre,  Pays de Galle, Ecosse).
Les gaëls sont les celtes d’Irlande.
Les gaulois sont établis sur le continent.

Pour les néospiritualistes du XIX ème siècle, le druidisme serait issu d’une science multi millénaire.

Il faut garder en mémoire que les sites mégalithiques (menhirs, dolmens…) existaient avant l’arrivée des celtes (4ème à 2ème millénaires av. J-C) mais les druides ont utilisé ces sites comme lieux de culte.

Beaucoup d’auteurs du XIX ème siècle ont inventé des origines mythiques aux celtes, allant jusqu’à affirmer que la langue celtique était la mère de toutes les langues…et parlée par Adam et Eve eux-mêmes… ou que le druidisme était l’ancêtre de l’indouisme…

Certains inventent une origine nordique (Scandinavie), mais le druidisme n’a jamais existé chez les vikings.

Autre hypothèse, les Atlantes: on pourra se reporter à la description par Platon de l’Atlantide, continent disparu et certains témoignages d’auteurs de l’antiquité évoquant le peuple des vénêtes qui ont donné  leur nom à la ville de Vannes en Armorique et Venise en Italie. Ce serait une civilisation antérieure aux celtes.

Les gaulois sont des celtes habitant au second âge du fer (entre -500 et le début de notre ère) la France actuelle, la Belgique, l’Allemagne cisrhénane, la Suisse et l’Italie cisalpine.

L’étymologie du mot « druide »est discutée, mais tout le monde s’accorde pour reconnaître dans le second terme de ce composé la racine « weid » (savoir, voir). en langue allemande « wissen » est le verbe « savoir ». Le  premier terme est souvent interprété comme le préfixe intensif indo-européen « dru » (dur, fort comme le chêne) d’où la traduction courante « les très savants ».

Depuis les romains, avec Pline l’Ancien et Lucain, on a pensé que le mot « druide » était associé au chêne  (« drus » en grec) à cause des rites associés à cet arbre. Les linguistes et les philologues ont établi que ce terme celtique, présent dans les textes  de Jules César et ceux du Moyen Âge provenait de « dru-wid-es » qui signifie « très savant ».

Une parenthèse au sujet du chêne et du gui:

Aux yeux des anciens, le chêne a représenté l’axe vertical qui relie le monde souterrain des puissances génératrices de la vie au monde céleste d’où provient toute la lumière.
Le bois de chêne possède la faculté d’emmagasiner une forte concentration de charges électriques, il attire souvent la foudre. Il est devenu le siège de Zeus, maître des orages.
Les druides considéraient le chêne comme une manifestation de la puissance céleste.
Selon le témoignage de Pline l’Ancien, les druides n’ont rien de plus sacré que le gui et l’arbre qui le porte pourvu que ce soit un rouvre, autre nom du chêne.
Ils n’accomplissent aucune cérémonie religieuse sans son rameau. Ils croient que le gui, pris en boisson, donne la fécondité à tout animal stérile, que c’est un remède contre tous les poisons.

Pline signale néanmoins la rareté du gui sur le chêne car l’écorce du chêne est trop dure et le gui ne  parvient à s’implanter que sur les arbres très jeunes. On notera que le gui se trouve plus facilement sur les  pommiers, pruniers, érables.
Le gui a des vertus thérapeutiques et les gaulois l’employaient contre l’épilepsie et  la résolution des tumeurs.
Aujourd’hui, le gui est reconnu comme hypotenseur, tonique cardiaque, diurétique, sédatif.
Les gaulois, selon Pline, l’appelaient « celui qui guérit tout ».
Mais son action importante sur le système nerveux peut générer, en cas d’excès, des risques mortels par paralysie.
On peut retenir que les druides extrayaient du gui de chêne une liqueur spiritueuse analogue au sôma des brahmanes, boisson divine et initiatique associée au dieu lunaire Sôma.

Vous avez tous reconnu la potion magique que Panoramix fournit à Astérix…

Je ferme cette parenthèse pour rappeler que le druide est un personnage très important de la société celtique et des gaulois.

Il est à la fois ministre du culte, théologien, philosophe, gardien du savoir et de la sagesse, historien, juriste et aussi conseiller militaire du roi et de la classe guerrière. Il est l’intermédiaire entre les dieux et les   hommes.

Il est chargé de la célébration des cérémonies sacrées et lui seul a le droit de pratiquer les sacrifices.

Le druide le plus célèbre est DIVICIACOS cité par César dans la Guerre des Gaules et Cicéron dont il fut l’hôte.

Comme pour beaucoup d’éléments de la civilisation celtique, nous ne disposons d’aucun texte d’origine interne. Les druides considéraient que la parole écrite est morte et ont privilégié l’oralité et la mémoire pour la transmission du savoir.

La société celtique est divisée en 3 ordres sociaux

  • l’ordre sacerdotal qui possède le savoir et fait la loi qui administre le sacré et le religieux.
  • l’ordre des guerriers qui gère les affaires militaires sous le commandement du roi
  • l’ordre des producteurs (artisans, agriculteurs, éleveurs) qui doit subvenir aux  besoins de l’ensemble de la société.

Hiérarchie et structure de l’ordre sacerdotal:

Cet ordre est hiérarchisé en 3 classes d’hommes faisant l’objet d’honneurs extraordinaires:

Les bardes, les ovates, les druides suivant la description faite par Strabon.

  • Les bardes sont les chantres sacrés. Ils sont spécialisés dans la poésie orale et chantée, leur rôle est          de faire la louange, la satire ou le blâme.
  • Les ovates sont les devins qui s’occupent des cérémonies religieuses et interrogent la nature. Ils s’occupent  plus particulièrement du culte, de la divination et de la médecine.
  • Les druides professent, indépendamment de la phisiologie ou philosophie naturelle, l’éthique ou la  philosophie morale. Ils interviennent dans la religion, le sacrifice, la justice, l’enseignement, la poésie, la   divination… En tant que ministre de la religion, les druides procèdent à tous les rites cultuels y compris les sacrifices.

Les sacrifices humains de prisonniers de guerre sont attestés mais ils étaient réservés à des circonstances exceptionnelles.Les sacrifices animaux (chevaux, taureaux, porcs..) ou symboliques sont les plus courants.

Ils ont la responsabilité de l’enseignement par une transmission orale du savoir.

Ils se chargent de l’instruction des enfants de l’aristocratie dont certains deviendront druides à leur tour. Dans la tradition irlandaise, le druide mythique CATHBAD aurait eu 150 élèves.

En contrepartie de cette longue initiation (20 ans), ils sont exemptés d’impôts et n’ont pas à porter d’armes, mais ils peuvent participer à la guerre.

Certains sites archéologiques laissent penser que les druides étaient également  chirurgiens. On y a trouvé des instruments métalliques ( scies, scalpels, pinces, sondes, couteaux en bronze) mais aussi des os ressoudés, des crânes trépanés.

Dans le contexte celtique, le domaine juridique fait partie de la théologie et relève de la religion. Les druides sont donc juristes et juges. Magistrats, ils tranchent pour les conflits graves entre les tribus gauloises et pour les litiges entre particuliers.

Le non respect d’un contrat est sanctionné par des peines qui sont codifiées selon la nature de la  faute et le rang des parties dans la hiérarchie sociale.

Selon César, ils tiennent leur assemblée générale annuelle dans la forêt des Carnutes (près de l’actuelle ville de Chartres).

Ils sont les acteurs de l’unité gauloise et considérés comme la résistance à la présence romaine ce qui expliquera l’attitude hostile des empereurs romains à leur encontre (ce qui participera à leur disparition progressive).
En tant que savants et garants du savoir, ils interviennent dans les domaines de la  philosophie, de l’histoire, de la généalogie. Ils maîtrisent plusieurs langues (grec, étrusque, latin).
Leur grande connaissance de l’astronomie leur a permis de conceptualiser le temps: le calendrier de Coligny date de l’époque gallo-romaine et ses inscriptions constituent un calendrier en langue gauloise.
Le roi exerce sa souveraineté sous l’inspiration du druide qui lui doit le conseil. Le pouvoir politique est sous la dépendance du pouvoir spirituel.

 

Les pratiques:

Selon certains textes irlandais, les druides interviennent au moment de la naissance pour donner un nom à l’enfant et pratiquer une lustration que l’on peut assimiler à un baptème.
Ils interprètent les présages, expression de la volonté divine et leur parole est sacrée. Le mot irlandais « geis » est une incantation constituée d’obligations et d’interdits que les membres  de la classe des guerriers doivent respecter sous peine de mort. La « geis »a force de loi, elle s’adresse également au roi et recouvre l’ensemble des activités de la vie quotidiene.

Les éléments participent à cette religion:

  • L’eau a un pouvoir de lustration.
  • Le feu sert aux sacrifices ou à la purification des troupeaux.
  • Le vent a le pouvoir d’égarer ou d’anéantir et le brouillard permet de se déplacer de manière invisible.

Les fêtes religieuses:

L’année celtique comporte quatre grandes fêtes religieuses au caractère obligatoire.L’année est marquée par une saison sombre et une saison claire.
Samain (dont le sens est « réunion ») a lieu aux alentours du 1er novembre. C’est la fête la plus  importante.   Elle inaugure une période de noirceur et d’épreuves. C’est le passage d’une année à l’autre. Elle dure une semaine qui est hors du temps favorisant les contacts avec « l’autre monde ». C’est le moment où les vivants et les morts se rapprochent. Elle se caractérise par des festins et des beuveries.
Imbolc qui signifie « lustration » a lieu aux alentours du 1er février. C’est la purification qui marque  la fin de la période hivernale. Cette fête évoque l’éveil, le printemps. C’est le temps de la  régénération.
Beltaine ou « les feux de Bel » aux alentours du 1er mai. Fête sacerdotale en rapport avec Belenos et Belisama. Elle marque le passage de la saison sombre à la saison claire avec le changement d’activités.   Les druides allument de grands feux pour protéger le bétail marque de richesse. C’est la deuxième date importante du calendrier.
Lugnasad ou « assemblée de Lug » est célébrée aux alentours du 1er août. Cette fête est associée  aux moissons, aux bénéfices, à l’abondance. C’est l’occasion de conclure toutes sortes de contrats (commerciaux, matrimoniaux, juridiques).

Le druide, ce philosophe :

Pour l’historien et archéologue Jean-Louis Brunaux, les druides ne sont ni de gentils professeurs, ni de cruels sacrificateurs. Il faut voir le druidisme comme une école philosophique « à la grecque » qui aurait régné sur la Gaule du V ème au IIème siècles av. J-C pour décliner et disparaître au tournant de l’ère chrétienne. Lorsque César (100-44 av.J-C) part en campagne en 58 av.J-C, il ne reste presque plus de druides. Un siècle et demi avant Suetone, les druides pouvaient être considérés comme les alter ego des  philosophes grecs.

Selon César, « les druides apprennent par cœur un grand nombre de vers car ils estiment que la religion interdit de confier leurs cours à l’écriture alors que pour les comptes publics et privés, ils utilisent  l’alphabet grec. Ils discutent sur les astres et leur mouvement, sur la grandeur du monde et de la terre, sur la nature des choses »…. « ils cherchent à établir que les âmes ne meurent pas mais passent après la mort, d’un corps dans un autre ». C’est la croyance dans la transmigration des âmes. La prohibition de l’écriture s’impose pour conserver le secret de l’enseignement, de l’initiation, de la pratique de l’astronomie….
Selon Jean-Louis Brunaux, de nombreux auteurs grecs se sont interrogés sur les ressemblances  entre les idées pythagoricienes et celles des druides (Pythagore vers 580-497 av. J-C).

Il ne faut pas exclure des liens entre les premiers cercles pythagoriciens et le druidisme car dès les plus hautes époques, les contacts entre le monde celte et la Méditerranée sont fréquents en  particulier via la colonie grecque de Phocée (Marseille).

L’ascension des druides cesse brutalement entre la fin du IIème siècle av. J-C et la conquête romaine.
Parmi les causes principales, deux catastrophes guerrières: la main mise romaine entre 125-121 av.  J-C  puis l’invasion des Cimbres et des Teutons de 110 à 101 av. J-C. Il faut ajouter des conflits internes aux peuples gaulois eux-mêmes entre les Arvernes, les Eduens,   les Séquanes et les Allobroges. Les récits de Cicéron suite à ses entretiens avec DIVICIAC, un des derniers grands druides connus  évoquent ces évolutions.

DIVICIAC donnera une orientation pro-romaine au parti populaire et aidera César dans ses actions en Gaule en essayant de profiter du contexte pour lui-même et ses proches.

L’émancipation des populations au bénéfice des valeurs civilisatrices romaines est une cause importante de la disparition des druides. Il faut également retenir que les druides et leur culture ont été victimes des attitudes très hostiles des empereurs romains tels AUGUSTE, TIBERE, CLAUDE…

Les nombreux écrits consacrés au cours de l’histoire aux druides datent d’une période où ils avaient disparu en tant que corps constitué et où ils n’étaient plus représentés que par des  survivants isolés. La tradition pédagogique des druides s’est perpétuée jusqu’à la fin du IVème  siècle de notre ére. mais le christianisme prend très lentement le pas sur le druidisme avec des réminiscences de pratiques païennes encore présentent au XVIIème siècle en Bretagne. Pour trouver la trace des druides, il faudra les rechercher dans les iles britanniques.

En résumé, on peut retenir trois figures distinctes dans l’appelation « druide »:

  • le druide historique connu exclusivement en Gaule
  • le druide irlandais ou littéraire
  • le druide mythique, création moderne qui peut être qualifié de médiatique

LE NẺODRUIDISME

Tout a vraiment commencé au XVIIème siècle à Oxford au sein du « Bosquet druidique » MOUNT HAEMUS qui daterait de 1245. Mais, selon certains, il aurait existé à Oxford deux cents ans plus tôt un autre bosquet dont les membres perpétuaient la tradition druidique.

Deux personnages fréquentèrent le bosquet d’Oxford: Elias Ashmole et John Aubrey.

Elias Ashmole était alchimiste, docteur en sciences physiques, historien, archéologue, musicien et membre de la Royal Society. Il fut reçu franc-maçon en 1646. Il passe pour le prototype du rose-croix. Il meurt en 1692. D’après la tradition du Druid Order, il aurait été à l’origine des premiers rituels initiatiques transmis aux francs-maçons spéculatifs, rituels inspirés du druidisme.

Quant à John Aubrey chef druide du Bosquet Mount Haemus, il est connu pour ses recherches archéologiques sur les sites d’Averay et de Stonehenge. Il associa les monuments mégalithiques aux druides… !! Il forma un disciple, l’irlandais John Toland et lui confia la mission de regrouper tous les adeptes de la tradition druidique. Le 21 septembre 1716, jour de l’équinoxe d’automne, un hérault mandaté par John Toland, proclama au sommet de la Primrose Hill à Londres, la convocation de « tous les druides pouvant exister de par le monde pour l’assemblée qui aurait lieu le 22 septembre 1717 à Londres, à la Taverne du Pommier ». L’assemblée décida la fondation du Druid Order dont John Toland fut institué le premier chef-druide.

On pourra retenir qu’en juin 1717 naissait la Grande Loge de Londres et en septembre 1717 renaissait le celtisme.

A noter que la Taverne du Pommier était une des quatre tavernes londoniennes où se réunissaient les Francs-Maçons.

Le mouvement néodruidique s’est répandu dans le monde entier. Les diverses branches dérivent la plupart du « gorsedd » (ou assemblée) des Bardes de l’île de Bretagne créée en 1792 par Edward Williams (1747-1846). Il a mélé des textes apocryphes à ses propres compositions littéraires, élaborant le règlement interne et le rituel de son organisation.

Il faut considérer le néodruidisme comme un mouvement philosophique, littéraire et idéologique moderne soucieux de conserver en héritage certains pans du passé: la langue, la défense, l’illustration poétique et littéraire de l’identité culturelle celtique. Le néodruidisme « gorseddique » a acquit une place très importante dans le renouveau national et linguistique gallois au travers de festivals poétiques et musicaux très importants et populaires.

Naissance du Gorsedd breton:

Le processus d’exportation du néodruidisme gallois en Bretagne a démarré en 1899 lors d’assises à Cardiff en présence d’une vingtaine de bretons qui venaient de créer en août 1898 l’union régionaliste bretonne à Morlaix.

Le 1er septembre 1900 à Guingamp se tient la première assemblée du Gorsedd des bardes de la presqu’île de Petite Bretagne dirigée par son premier « grand druide » Jean Le Fustec.

De 1945 à nos jours:

Après la seconde guerre mondiale, les assemblées sont plus discrètes avec une tendance plus philosophique et néopaîenne. Cette évolution a généré des scissions donnant naissance à des sociétés plus ésotériques :

  • « Croyance celtique » en 1936
  • « Confrérie philosophique des druides » en 1975

Le nom complet du Gorsedd de Bretagne est aujourd’hui « Fraternité des druides, bardes et ovates de Bretagne ».

Qui sont les nouveaux druides bretons ?

Des groupes druidiques émergent dans de nombreux pays (Australie, Nouvelle Zélande, Allemagne, Etats Unis). Au Royaume Uni, le néodruidisme est reconnu comme une religion. Cette tendance néopaïenne renaît depuis les années 60 mais les groupes druidiques ont leurs propres rites et caractéristiques. Mais ils ont tous le culte de la nature. En fait le Gorsedd n’est pas une religion mais plutôt une société de pensée humaniste ou philosophique. L’esprit, la matière, les animaux, la nature, tout l’univers est divin. C’est une société très hiérarchisée et ne devient pas druide qui veut. Pour intégrer la communauté, le postulant doit faire ses preuves pendant au moins deux ans. Après cette période de probation, il devra choisir entre deux grades: bardes ou ovate. Les premiers (tel Assurancetourix) sont recrutés parmi les musiciens, les écrivains poètes ou artistes. Les seconds parmi les menuisiers, ingénieurs ou agriculteurs; ils ont la capacité à transformer la matière. Tous pourront ensuite postuler au titre de druide après avoir acquis une certaine maturité et connaissance du Gorsedd. Enfin le collège druidique élit son Grand Druide chargé notamment de présider les 4 grandes cérémonies annuelles: Samain, Imbolc, Beltaine et Lugnasad qui sont les 4 fêtes religieuses majeures celtes.

La filiation entre ce néodruidisme et les druides de l’Antiquité est peu probable car il existe très peu d’écrits de l’antiquité. Il n’y a ni filiation historique ni texte fondateur. On peut se poser la question de dérives sectaires.

L’Assemblée Druidique du Chêne et du Sanglier (ADCS) considère le druidisme comme une religion à « mystères ».

  • un ensemble de mythes, de rites, de postulats
  • un cheminement, un cursus, une progression dont l’accès suppose une initiation.

Tout membre de l’ADCS se doit

  • d’honorer les dieux, de respecter les ancêtres et la nature
  • de cultiver le savoir sous toutes ses formes
  • de respecter les autres, en particulier par la correction du langage et de l’écoute attentive de sa pensée et            de son expression
  • de respecter la tradition comme véhicule d’un travail légué par ceux qui nous ont précédés
  • de respecter la parole donnée

Le rituel druidique de l’ADCS s’appuie sur le mythe et sur une certaine conception de l’espace et du temps. Il a de multiples formes et de multiples buts: saisonniers, propriatoires, rites de passage y compris les passages de la vie (naissance, mariage, funérailles…)
L’ADCS célèbre au minimum huit fêtes dans l’année.

Quel est le chemin?

  • sur la voie bardique, le chemin s’appuie sur la parole
  • sur la voie de l’ovate, le chemin s’appuie sur le chemin de l’être
  • sur la voie du druide, le chemin est amour équilibré, détaché de tout projet sur l’autre

Toute personne demandant son admission au sein d’une clairière en devient « mabinog » ou « marcassin ».
Etre « mabinog », c’est être symboliquement en contact avec la terre et son humus.

Le cheminement du barde:
Le barde est le chantre de la tradition, il est diseur, trouvère. C’est la fonction la mieux codifiée. Ils sont les garants de la transmission du mythe, de    l’histoire des lieux, des lois, de la généalogie.

Le cheminement des ovates:
L’ovate est un magicien, un devin, un guérisseur. Il parle aux esprits, ceux des arbres, des animaux, des plantes, des sources.

Le druide est à la fois un théologien, philosophe, historien, savant, juriste. Il est l’intermédiaire entre les hommes et les dieux, le sage, le prêtre et le gardien du savoir.

(Rappel):
On le représente comme un homme à barbe blanche vêtu de la saie et portant une faucille en or et un collier d’ambre.

Les 6 cérémonies initiatiques :

L’année celtodruidique commence au solstice d’hiver avec la cérémonie de la « Modra Necht ». Cette fête est marquée par la cueillette du gui. Le gui symbolise la maturation de l’être désincarné en état de mort physique. En officiant on coupe le gui en disant « O Gehle an Heu » (« Le blé se lève »). Cette phrase a été traduite par « Au gui, l’an neuf ».
L’équinoxe de printemps (Alban Eilir) avec l’offrande d’un plant de trêfle symbole du printemps.
Les noces de Lug (Eured Lug): la cérémonie est célébrée le 15 août. Elle rend hommage à Lug et Gaéa. Mais les attributs irlandais de « Lugus » n’ont rien à voir avec le Lug gaulois, dieu de lumière. Ses attributs sont l’éclair dans le sens de flambeau.
L’équinoxe d’automne (Alban Elved): les forces conjuguées de l’air, de l’eau, du feu, de la lumière et de la terre ont oeuvré en commun pour fournir au règne animal et au genre humain les éléments indispensables au maintien de l’existence. C’est la période des récoltes.
Samonios (les semailles): c’est la fête de contact avec le monde des morts et celui des vivants. L’officiant ordonne la libation rituelle pour les défunts et les héros:

  • le lait pour les druides
  • l’hydromel pour les guerriers et chevaliers (représentés par les bardes)
  • le vin pour les agriculteurs (représentés par les ovates)

On célèbre le cheval blanc, bénéfique, symbole du soleil et de la divinité protectrice des vivants et des morts. On se garde par la magie des maléfices du cheval noir.

LES ORIGINES CELTES de la FRANC-MAÇONNERIE ?

En 1898, Albert Churchward, franc-maçon du 33ème degré, écrivait dans « Origin and Antiquity of Free Masonery »:
… » Les franc-maçons sont des druides contemporains »….
Whiliam Hutchinson écrit dans « L’esprit de la maçonnerie » à la fin du XVIII ème siècle :
… »la franc-maçonnerie a emprunté plus de doctrines et de cérémonies des druides qu’elle en a pris ailleurs »…
Thomas Paine, philosophe anglo-américain, écrit au début du XIXème siècle (1804-1805) que la franc-maçonnerie trouve ses racines traditionnelles dans les derniers héritages de la religion préchrétienne et celtique d’occident.
Ces éléments sont éloignés des textes fondateurs de la Franc-Maçonnerie des bâtisseurs de cathédrales que nous connaissons.

Quelques éléments de comparaison sont intéressants à analyser:

On trouve de nombreuses similitudes entre la symbolique maçonnique et la symbolique néo-druidique.

« Le cabinet de réflexion »:

La littérature païenne et le folklore irlandais connaissent un séjour souterrain dans les tumuli, demeures des peuples de la déesse Dana. Lieux de culte matriciel en Grande Bretagne. Les druides contemporains utilisent le terme de « tombeau des gestations ».

« Le dépouillement des métaux »

Voir la tradition irlandaise où le fer est inconnu.

« Le maillet du Dieu Taranis »

Outil sacerdotal tenu de la main droite

« L’épée », outil royal, est tenue dans la main gauche.

« Le sautoir » est commun aux francs-maçons et certaines écoles druidiques.

« La fraternité et la chaîne d’union »: ce rite se trouve dans les initiations guerrières des Gaëls.

« Les morts rituelles » par le fer, l’eau, le feu et les purifications initiatiques.

« L’incinération du testament »: lors des funérailles, les gaulois livraient des lettres adressées aux parents décédés, comme si les morts les liraient (selon texte de Diodore de Sicile)

Une Loge maçonnique:

« Trois la dirigent, 5 la composent, 7 la rendent juste et parfaite »

Pour le néodruidisme:

  • Un triumvirat de dieux primordiaux irlandais: Dagda (dieu-druide), Ogma (dieu de la magie     guerrière), Nuada (royauté)
  • Cinq dieux constituent l’état-major des Tuatha Dê Danann en ajoutant le dieu médecin Dianceth et le dieu forgeron Goibniu
  • Sept – le groupe est parfait avec en plus Luchtaine (dieu charpentier) et Credne (dieu chaudronnier)

L’orientation celtique se prend face à l’orient.
En loge, les Francs-maçons se tournent face à l’orient.
Les circumambulations sont identiques.
Qu’est-ce qui supporte votre loge ?
Pour les F.M., trois grands piliers: Sagesse, Force et Beauté.

Dans la société celtique

  • Sagesse pour les druides
  • Force pour les guerriers
  • Beauté pour les producteurs.

L’acclamation, les batteries, l’accolade fraternelle sont pratiquées de la même manière dans les deux traditions.

Mais nous n’irons pas au-delà de cette brève évocation car les textes fondateurs de la Franc-Maçonnerie réfutent les thèses des adeptes et fondateurs du néodruidisme, mais c’est une autre conférence ….

BIBLIOGRAPHIE:

Elle est très vaste, de l’antiquité à nos jours…

Les auteurs de l’Antiquité:
César – Lucain – Suetone – Tacite – Poseidonius d’Apamée – Pline l’Ancien – Cicéron…

Les auteurs des XXème et XXIème siècles:
« Les druides – Des philosphes chez les barbares » – Jean-Louis BRUNAUX
« Les religions gauloises » – Jean-Louis BRUNAUX
« Les celtes et le druidisme – Racines de la tradition occidentale » – Raimonde REZNIKOV
« Les druides » – GUYONVARC’H et LE ROUX
« Les druides – Science et Philosophie » – Paul et René BOUCHET*
*( Paul BOUCHET est « Grand druide des Gaules »)
La collection des 37 BD « ASTERIX » de R. GOSCINNY et A. UDERZO…..

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L’Eloge de la femme

Eloge de la Femme

par Robert MOSNIER  ( 21ème fauteuil)

            C est une gageure de vouloir conter en cinq à dix minutes l’éloge de la Femme qui représente plus de la moitié de l’humanité.

Lorsque le peintre naturaliste Gustave Courbet présente au Salon sa célèbre toile « L’Origine du monde » fit scandale représentant le sexe féminin, il ignore, certes,  la symbolique  qu’elle contient; le mystère de la vie et de la mort, l’organe féminin rentré à l’encontre du masculin externe et protubérant.

Mystère de la vie et de la mort. Telle est dans toute les cultures et civilisations le rôle de la femme.

Procréation – Naissance rapportées au culte de la fécondité de la déesse Gaïa, terre nourricière ou mort aveugle ou  jalousie, telle Diane chasseresse où Junon poursuit de sa colère les fruits de l’adultère de son mari, le Jupiter olympien.

Sortie des ténèbres de la préhistoire la femme fixe l’homme, impose la sédentarité à ce cueilleur, chasseur, pêcheur impénitent du paléolithique. C’est la première révolution, le néolithique amène l’humanité à la découverte de l’élevage, de l’agriculture et céramique aux protos cités Jéricho en Palestine Çatal Huyuk en Turquie, ébauche d’une société où la démographie aidant se dessine l’artisanat et le commerce, précurseur des lois et des statuts juridiques règlementant production et travail.

Ainsi sous l’influence de la femme la sédentarité apporte la richesse mais aussi la convoitise. Les tribus nomades restent à vocation guerrière et masculine, la ville est la première société polie. Il es est ainsi de l’Égypte où la place de la femme, sœur et épouse de pharaon, dieu et roi, elle-même pharaon, Hatchepsout. La femme rappelle le culte isien, la rémanence de l’amour qui redonne vie à Osiris, victime de son frère Seth. Inlassablement Isis retrouve le corps en morceaux, lui redonne vie alors que ses larmes inondent la vallée du Nil amenant la prospérité.

Il en est de même en Crète où la femme jouit d’un statut que l’homme n’a pas à lui envier.

Mais déjà vers le XIIe siècle avant Jésus Christ, des envahisseurs venus du Caucase se répandent en Asie, Iran, Inde et en Europe notamment en Grèce.

Peuple guerrier aux innombrables divinités et aux douze dieux de l’Olympe, plein des vicissitudes humaines combattues par Socrate instaure le dieu Raison. Les dieux ne sont que l’illustration des hommes, querelleurs brutaux. Les femmes sont objet du désir ainsi Coré, fille de Déméter enlevée par le dieu des enfers et rendue au printemps à sa mère pour être replongée dans les ténèbres l’automne arrivant.

Peuple de laboureurs et de paysans les romains perpétuent de façon plus grossière encore l’illustration de la Grèce. On doit à celle-ci de tout temps la naissance des arts, le culte de la beauté, la philosophie mais aussi la dette.

Pour Socrate la femme est représentée chez l’homme  par trois âmes, la viscérale le bas ventre impur, la force ou le courage inscrite dans le cœur (elle ennuie l’homme par ses demandes et récriminations) mais aussi la poésie, la pensée, l’idéal de l’amour c’est la courtisane dont la région est le foie d’où les haruspices ou augures.

Le christianisme rejetant le culte d’Aphrodite Vénus, institue celui de la virginité et du célibat, la beauté intérieure et la liberté dans la domination mais aussi la répression des pulsions clivent la femme : l’épouse et mère qui se rapporte à Marie et la femme fatale qui entraîne l’homme dans la décadence de l’enfer Ève.

Les grandes invasions du Ve au Xe siècle, l’effondrement qui en résulte ramène vols, viols et pillages. Le nomade arabo berbère, hongrois ou normand apporte désolation et misère, renoue avec l’esclavage mais dès le Xème siècle l’église triomphante le réduit à la servitude et libère la femme de son statut d’objet consacrant par le mariage l’inviolabilité de son corps, tabernacle du mystère divin de la vie. L’historien Duby a su magistralement démontrer que la fin des guerres féodales est liée à cette initiative qui plonge dans l’excommunication le violeur et rend la dignité à la femme.

C’est le temps des trouvères et des troubadours « du fin amor ou du tendre amor » dont l’illustration féminine la plus célèbre est la reine Aliénor d’Aquitaine, reine de France et d’Angleterre, mère de Richard Cœur de Lion, le parfait chevalier.

L’amour conjugal est représenté par Saint Louis qui malgré l’hostilité de sa mère Blanche de Castille ne se sépare pas de son épouse, pour autant assez effacée.

La femme, inaccessible, phantasmée, rêvée que porte la mélancolie du pauvre troubadour ou du chevalier errant à la recherche de l’idéal, de la sublimation.

La femme a aussi un statut juridique qu’elle n’aura plus à l’époque contemporaine. Elle peut tester, administrer les biens de ses enfants, recevoir les hommages, demander réparation.

Dans les bastides, zones franches, c’est-à-dire,libres de toutes servitudes, elle a à peu près les mêmes droits que l’homme.

Le XIVe siècle apporte désolation, peste, famines et guerres, périodes de mort où le Christ décharné, miséreux recueille les péchés des hommes. Alors une héroïne naît à l’instar de Judith de l’Ancien Testament sauvant le peuple hébreu, Jeanne la Pucelle de Donrémy qui investit le pauvre dauphin peu sûr de son ascendance délivre Orléans et le couronne à Reims, car c’est cela aussi la femme, l’héroïne.

Celle qui au mépris du danger n’a pas peur, ne fuit pas comme l’homme, se rebelle lorsque ses enfants ont faim ou sont sous la servitude.

Une autre Jeanne, Jeanne Laisné dit Hachette sauve Beauvais des entreprises du Téméraire.

Les temps modernes sont une régression. L’absolutisme royal se méfie de la femme. Maitresse, elle peut induire la politique. Combien notre Henri de Villemur est tancé par le sage Sully qui se méfie avec juste raison des maîtresse du roi.

Madame de Maitenon, l’épouse morganatique de Louis XIV l’influence dans sa politique religieuse et l’abrogation de l’Edit de Nantes annonçant une régression industrielle et financière de notre pays. Louis XIV, inquiet et bigot, croit ainsi racheter ses fautes de jeunesse.

Sous Louis XV, Madame de Pompadour fait et défait les ministères mais encourage les arts et l’on devrait dire « style Pompadour plutôt que style Louis XV ». Il en est de même pour l’infortunée Marie Antoinette.

Napoléon malgré son génie se méfie de la femme. Il dit à Madame de Staël qui lui demande quelle est la femme qu’il admire le plus « celle qui fait le plus d’enfants ». Il pense bien évidemment à sa mère. Le Code Civil réduit la femme à la minorité et cela pendant près de deux siècles.

Le XIXe siècle est celui de la révolution industrielle et des idéologies qui l’accompagnent. Siècle de contrastes, de progrès en matière scientifique, technique mais aussi d’éducation sous l’influence des ministres Durye sous le Second Empire et Jules Ferry en 1881.

Mais quelle régression, paupérisation propre au monde ouvrier, demi mondaines de la Belle Époque.

La femme oscille entre salon et cuisine, domesticité et usine.

Le premier baccalauréat  féminin a lieu sous le Second Empire, la première licence sous la IIIe République. La promotion sociale passe par le brevet élémentaire et l’accès au rôle d’institutrice, puis les premières infirmières qui remplacent lentement mais durablement les cornettes des religieuses.

La politique voit une Louise Michel, l’institutrice de la Commune, prôner l’éducation des classes populaires.

La guerre de 1914 ouvre les emplois masculins aux femmes: postes, transports, usines et travaux agricoles mais ne leur apporte pas leur émancipation. Celle-ci au début des années folles débute par le raccourcissement des jupes, on voit les mollets, les genoux découverts ne seront atteints que dans les années soixante et le charleston.

La seconde guerre mondiale et la résistance où les femmes sont les meilleurs agents de liaison où leur héroïsme soutient les combattants et leur abnégation dans les camps de concentration leur amène enfin à la libération un statut politique.

En 1945, elles ont le droit de vote, la sécurité sociale et notamment les caisses d’allocations familiales leur enlèvent un souci essentiel, celui d’élever correctement leurs enfants.

Il faudra attendre 1967 pour qu’elles puissent librement sans la permission de leurs maris avoir accès à un carnet de chèques à leur nom. Mais le combat est aujourd’hui loin d’être gagné.

La femme amante, la femme héroïque, la femme artiste, mécène mais aussi entrepreneure, scientifique telle Marie Curie, prix Nobel, philosophe Simone Weil, humanitaire Geneviève de Gaulle, Mère Térésa n’est-elle pas comme l’a su si bien dire en poésie et chanson Jean Ferrat :

« La femme est l’avenir de l’homme ».

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L’inceste et le pardon

L’ Inceste et le Pardon.          

par Robert MOSNIER (21ème fauteuil)

  Nos sociétés jusque là aveugles découvrent le refoulé Criminel ! Cette acceptation libère l’esprit mais incline à la vengeance d’autant plus redoutable que la chape de plomb d’une complicité sociétale a couvert le déni, étouffé la parole des victimes et protégé leurs tortionnaires.

Le bien-fondé de cette délivrance se couvre de malédiction, incite au doute et inspire la trahison.

La dénonciation des crimes sexuels sur les mineurs dépasse notre imaginaire et ne trouve pas d’écho dans nos représentations mentales tant l’horreur persistante et la lâcheté de ceux qui auraient dû voir nous semblent inconcevables. Il en résulte incompréhension et dégoût.

Comment nous soustraire à de telles images! La tentation est de réduire le violeur à son acte, de vouloir qu’il disparaisse,  le rejet est tel que la condamnation unanime doit le poursuivre sa vie durant.

L’opprobre l’efface de toute vie en collectivité, le soupçon imprégnera durablement toute attitude, décision, orientation qu’il pourrait prendre!

Le remords serai-il sincère, prête à équivoque, la violence de l’acte maintient et pérennise le rejet.

Le déni ce voile marqué à peine levé sur les victimes, cette prétendue séduction de l’enfance trompée et trahie dans son amour envers ceux dont la mission est la protection, inflige à la victime une double peine, celle de devoir se taire et la culpabilité associée.

Le silence ordonné sur la parole de l’enfant, le refoulement subit, la mémoire du traumatisme enfoui engagent la perte de son estime, le doute permanent sur ses sentiments, leur ambivalence marquée du sceau de la complicité et de l’incomplétude.

L’enfant pétri dans un imaginaire fécond ne saurait être cru et si cela est, la responsabilité se retourne sur l’entourage, une épouse lointaine, une mère sourde, absente à la réalité de son enfant mais pis encore l’honneur de la famille élargie marqué du sceau de l’infamie.

Alors est signifié l’abandon, la victime coupable de l’éclatement de la famille, sa responsabilité devant sa misère programmée, ce déplacement, cette projection ignoble où le corps institutionnel, famille, profession comptent plus que la personne de l’enfant…

Le violeur tend à s’exonérer de sa responsabilité, de ses pulsions incontrôlées, prisonnier de sa propre histoire, des traumatismes et influences de sa propre enfance, des images où il se complait pour renforcer sa propre addiction.

Notre lâcheté collective basée sur la naïveté et notre absence de représentations mentales  de tels actes ont durablement influencé notre position, cette mise sous couvercle étanche pour étouffer la vérité.

Le pardon serait-il à terme envisageable après la sanction prononcée et vécue, la condamnation proclamée sans ambiguïté et la victime lavée de sa tâche et exonérée de toute    participation.

Le drame inscrit dans la longue durée perturbe la vie émotionnelle de toute une famille, compromet les choix de vie et la liberté confisquée interdit l’épanouissement de l’être…

L’entourage s’est tu. Les indices n’ont pas été explorés, la parole muette engage la responsabilité collective.

Le regard ne peut se détacher des apparences, comme figé dans une impossible rédemption, un doute qui meurtrit l’âme, appelle nos conduites d’évitement et cette dérobade envers ce qui ne nous regarde pas.

Dans cette poursuite sans fin d’un aveu qui ne dit mot, d’une reconstruction fragile et arbitraire, le pardon peut-il avoir une place vis à vis de ce crime de l’innocence? La sanction prononcée, la peine appliquée, la dignité de la victime recouvrée, sa souffrance exonérée d’une quelconque responsabilité reconnue, subsiste la condamnation morale, peut-elle un jour être levée?

L’agresseur  doit vivre l’effondrement de son système de défense, minimisant son acte ou le reportant à des pulsions incontrôlées, déplaçant sa responsabilité ou la relativisant au travers d’une histoire familiale traumatique. Sa souffrance s’effacera devant celle de sa victime qu’il ne peut plus nier, il passe par une phase de désespérance, seule voie vers la délivrance.

Recouvrer l’estime de soi au delà des multiples absences et abandons est un long et lent travail dont il est plus facile de se soustraire ou le mettre entre parenthèses mais nécessaire pour se réconcilier avec soi-même et retrouver un crédit à sa propre parole et celle des autres.

Ainsi l’inceste n’implique pas seulement deux êtres murés dans le secret, enfermés dans une absence de perspective, mais tout notre environnement!

L’actuelle demande de la société, dénonçant la lâcheté et l’hypocrisie, interpelle le législateur, impose une mise en garde et interdit toute compromission.

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La Monarchie anglaise

    La Monarchie Anglaise.

De la Symbolique au fonds de Commerce.

par Robert MOSNIER (21ème fauteuil)

            La monarchie anglaise, détachée depuis la Révolution de 1688 de la politique en direct, est un symbole qui vire au mythe.

La personne sacrée de la Reine, au physique comme au moral, lien d’union entre le Royaume et l’Empire du Commonwealth, est le garant de l’entraide et de la paix entre ses états membres, sans antagonisme de leur appartenance et de leur puissance relative.

Mythe où s’accorde l’identification des divers peuples à une même famille dont les joies, les soubresauts, les travers rappellent les Dieux de l’Olympe, errements et contradictions de la pensée humaine.

Cette attache où s’expose une vie idyllique dans un cadre enchanteur, une proximité relative et contrôlée, n’en est pas moins secouée de désordres et scandales retentissants.

Miroir, où chacun se projette et autorise dans des raccourcis fallacieux,une réassurance, la monarchie s’en relève, les frasques de ses membres éveillent la curiosité et distraient d’une vie terne et parfois monotone leurs sujets au quotidien dont la vie ne présente pas le même  relief. L’extrême pesanteur du protocole auquel princes et princesses sont assujettis autorisent cet aspect pulsionnel mais les débordements ne doivent pas compromettre le bon fonctionnement de l’Institution, la Cour y veille, le peuple s’en amuse mais ne saurait tolérer certaines déviances rendues publiques où l’aspect criminel ou complice est dénoncé.

Ce fut le cas du Prince Andrew, héros des Malouines et compromis dans des affaires de mœurs, rappelant l’ancien adage des Romains  «La Roche Tarpéienne est tout près du Capitole.»

Entrer dans l’intimité de la famille royale, c’est entrer en religion. Abandonner qui l’on est, renoncer à ses gestes, ses actes, ses espoirs pour appartenir à un ordre supérieur dicté au jour le jour, celui d’une constante bienveillance, d’un intérêt soutenu immédiatement oublié.

Ce n’est pas une éternelle représentation, un formalisme à l’évolution lente et mesurée mais un socle qui pérennise le fondement de la monarchie, distance qui n’est plus hiératique et figée mais qui demeure raisonnable au travers d’une apparente familiarité.

Il importe de se laisser guider, l’émotion est retenue, les sentiments bridés ou exposés avec mesure car les chausse-trappes sont légions, les interprétations d’une presse à scandales indignes et perverses.

Le caractère sacré domine le temporel. Jusqu’au Traité d’Amiens 1802, les armoiries   anglaises, écartelées aux Lys de France rappelaient le pouvoir thaumaturge de ses rois et reines même s’ils le manifestaient moins que leurs frères continentaux.

L’édifice s’est ébranlé, mais si cela correspond à un vent de modernité, une tolérance se change en renouveau et l’influence de la famille s’accroit, un souffle de vie remplace un repli nostalgique.

La Reine l’a parfaitement intégré en acceptant chez ses petits enfants des unions improbables, non convenues mais conformes à l’esprit du temps, choix personnel mais qui ne doit pas déroger aux fondamentaux et lois organiques propres à la monarchie.

Celle-ci repose sur le temps long, l’arbitrage est le fait du souverain, se soumettre ou se démettre telle en est l’alternative!

Aujourd’hui, elle doit lutter contre une déviance plus redoutable qui fragilise et met en péril l’institution, cette inscription de tout ou partie de l’héritage dans un complexe commercial où la couronne réduite à une valeur marchande serait dévoyée, le peuple britannique l’a parfaitement saisi, l’enjeu en serait une rupture définitive et une désaffection qui conforteraient la minorité hostile à cette alliance millénaire d’un peuple avec une famille, le mythe disparaîtrait à jamais!

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La Mendicité

          La Mendicité.

                                  Une profession pas comme les autres.

par Robert MOSNIER  (21ème fauteuil)

            Sous l’ancien Régime au XVIII Siècle, les rôles de la capitation (impôt par tête) présentent une profession différente des autres, celle de mendiant ou d’indigent sans affectation d’une quelconque somme, pour cause d’absence de revenus. Devant l’abondance des calamités de toutes sortes ce qualificatif n’avait rien d’injurieux ou de méprisant.

            Le mendiant jouissait de droits et prérogatives, s’ils n’étaient pas usurpés il pouvait instruire des procès contre les seigneurs laïcs ou ecclésiastiques ou la communauté villageoise ou quelque particulier dans l’abondance. Ces droits remontaient au moyen-âge, les faire valoir ou les tirer de l’oubli étaient œuvre estimable de charité.

Ils s’exerçaient lors de fêtes religieuses, ainsi en Gévaudan, on donnait deux fois par semaine la pièce, pain d’avoine ou de seigle agrémenté de vin ou autres victuailles, malheur à ceux qui s’en dérobaient, les nantis devaient en rendre compte aux autorités.

C’était l’obligation de l’aumône, l’esprit de l’évangile au travers des béatitudes en constituait le socle.

L’obligation de chercher et exercer un travail était le plus souvent un vœu pieux sans consistance réelle et n’engendrait pas de rejet, il fallait seulement se tenir en accord avec la loi.

Puis vint la Révolution, sa conception du progrès et du bonheur reposant  sur l’utilité par le travail, principe égalitaire, ferment d’une société unie qui n’admettait plus les oisifs, se méfiait des rentiers au qualificatif de voleurs et oppresseurs. La  guillotine eut raison de pauvres hères  accablés de misère et empreints de paresse.

La Convention Nationale décrète la mendicité hors la loi source d’errances, de délits, de contagion, la raison impose que chacun participe à la vie en société, les malades, les handicapés, ou ceux accablés par l’âge en sont exemptés. La morale républicaine ne peut tolérer de passe droit.

Des ateliers nationaux, de grands travaux en matière d’infra-structures se doivent d’absorber ces populations et de tenter de les sédentariser.

La Révolution industrielle, plus tard le salariat introduisent un nouveau mode de dépendance, ce prolétariat à la pointe du combat et la recherche d’une dignité ne pouvait qu’être hostile envers ceux qui refusent un quelconque assujettissement .

Alors s’institue dans nos esprits une dualité, le pauvre travailleur méritant et le mendiant qui refuse sa quote-part à la vie en société.

La mendicité devient gêne, honte, peur ou mépris elle a perdu son caractère divin, l’image du Christ en souffrance. Plus elle est abondante, mieux elle disparaît. La commisération laisse place au jugement, à l’oubli, imprègne le regard qui se détourne.

«Écrasons l’infâme» avait prophétisé Voltaire depuis la justice ne s’accomplit plus dans la charité.

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