L’Eloge de la femme

Eloge de la Femme

par Robert MOSNIER  ( 21ème fauteuil)

            C est une gageure de vouloir conter en cinq à dix minutes l’éloge de la Femme qui représente plus de la moitié de l’humanité.

Lorsque le peintre naturaliste Gustave Courbet présente au Salon sa célèbre toile « L’Origine du monde » fit scandale représentant le sexe féminin, il ignore, certes,  la symbolique  qu’elle contient; le mystère de la vie et de la mort, l’organe féminin rentré à l’encontre du masculin externe et protubérant.

Mystère de la vie et de la mort. Telle est dans toute les cultures et civilisations le rôle de la femme.

Procréation – Naissance rapportées au culte de la fécondité de la déesse Gaïa, terre nourricière ou mort aveugle ou  jalousie, telle Diane chasseresse où Junon poursuit de sa colère les fruits de l’adultère de son mari, le Jupiter olympien.

Sortie des ténèbres de la préhistoire la femme fixe l’homme, impose la sédentarité à ce cueilleur, chasseur, pêcheur impénitent du paléolithique. C’est la première révolution, le néolithique amène l’humanité à la découverte de l’élevage, de l’agriculture et céramique aux protos cités Jéricho en Palestine Çatal Huyuk en Turquie, ébauche d’une société où la démographie aidant se dessine l’artisanat et le commerce, précurseur des lois et des statuts juridiques règlementant production et travail.

Ainsi sous l’influence de la femme la sédentarité apporte la richesse mais aussi la convoitise. Les tribus nomades restent à vocation guerrière et masculine, la ville est la première société polie. Il es est ainsi de l’Égypte où la place de la femme, sœur et épouse de pharaon, dieu et roi, elle-même pharaon, Hatchepsout. La femme rappelle le culte isien, la rémanence de l’amour qui redonne vie à Osiris, victime de son frère Seth. Inlassablement Isis retrouve le corps en morceaux, lui redonne vie alors que ses larmes inondent la vallée du Nil amenant la prospérité.

Il en est de même en Crète où la femme jouit d’un statut que l’homme n’a pas à lui envier.

Mais déjà vers le XIIe siècle avant Jésus Christ, des envahisseurs venus du Caucase se répandent en Asie, Iran, Inde et en Europe notamment en Grèce.

Peuple guerrier aux innombrables divinités et aux douze dieux de l’Olympe, plein des vicissitudes humaines combattues par Socrate instaure le dieu Raison. Les dieux ne sont que l’illustration des hommes, querelleurs brutaux. Les femmes sont objet du désir ainsi Coré, fille de Déméter enlevée par le dieu des enfers et rendue au printemps à sa mère pour être replongée dans les ténèbres l’automne arrivant.

Peuple de laboureurs et de paysans les romains perpétuent de façon plus grossière encore l’illustration de la Grèce. On doit à celle-ci de tout temps la naissance des arts, le culte de la beauté, la philosophie mais aussi la dette.

Pour Socrate la femme est représentée chez l’homme  par trois âmes, la viscérale le bas ventre impur, la force ou le courage inscrite dans le cœur (elle ennuie l’homme par ses demandes et récriminations) mais aussi la poésie, la pensée, l’idéal de l’amour c’est la courtisane dont la région est le foie d’où les haruspices ou augures.

Le christianisme rejetant le culte d’Aphrodite Vénus, institue celui de la virginité et du célibat, la beauté intérieure et la liberté dans la domination mais aussi la répression des pulsions clivent la femme : l’épouse et mère qui se rapporte à Marie et la femme fatale qui entraîne l’homme dans la décadence de l’enfer Ève.

Les grandes invasions du Ve au Xe siècle, l’effondrement qui en résulte ramène vols, viols et pillages. Le nomade arabo berbère, hongrois ou normand apporte désolation et misère, renoue avec l’esclavage mais dès le Xème siècle l’église triomphante le réduit à la servitude et libère la femme de son statut d’objet consacrant par le mariage l’inviolabilité de son corps, tabernacle du mystère divin de la vie. L’historien Duby a su magistralement démontrer que la fin des guerres féodales est liée à cette initiative qui plonge dans l’excommunication le violeur et rend la dignité à la femme.

C’est le temps des trouvères et des troubadours « du fin amor ou du tendre amor » dont l’illustration féminine la plus célèbre est la reine Aliénor d’Aquitaine, reine de France et d’Angleterre, mère de Richard Cœur de Lion, le parfait chevalier.

L’amour conjugal est représenté par Saint Louis qui malgré l’hostilité de sa mère Blanche de Castille ne se sépare pas de son épouse, pour autant assez effacée.

La femme, inaccessible, phantasmée, rêvée que porte la mélancolie du pauvre troubadour ou du chevalier errant à la recherche de l’idéal, de la sublimation.

La femme a aussi un statut juridique qu’elle n’aura plus à l’époque contemporaine. Elle peut tester, administrer les biens de ses enfants, recevoir les hommages, demander réparation.

Dans les bastides, zones franches, c’est-à-dire,libres de toutes servitudes, elle a à peu près les mêmes droits que l’homme.

Le XIVe siècle apporte désolation, peste, famines et guerres, périodes de mort où le Christ décharné, miséreux recueille les péchés des hommes. Alors une héroïne naît à l’instar de Judith de l’Ancien Testament sauvant le peuple hébreu, Jeanne la Pucelle de Donrémy qui investit le pauvre dauphin peu sûr de son ascendance délivre Orléans et le couronne à Reims, car c’est cela aussi la femme, l’héroïne.

Celle qui au mépris du danger n’a pas peur, ne fuit pas comme l’homme, se rebelle lorsque ses enfants ont faim ou sont sous la servitude.

Une autre Jeanne, Jeanne Laisné dit Hachette sauve Beauvais des entreprises du Téméraire.

Les temps modernes sont une régression. L’absolutisme royal se méfie de la femme. Maitresse, elle peut induire la politique. Combien notre Henri de Villemur est tancé par le sage Sully qui se méfie avec juste raison des maîtresse du roi.

Madame de Maitenon, l’épouse morganatique de Louis XIV l’influence dans sa politique religieuse et l’abrogation de l’Edit de Nantes annonçant une régression industrielle et financière de notre pays. Louis XIV, inquiet et bigot, croit ainsi racheter ses fautes de jeunesse.

Sous Louis XV, Madame de Pompadour fait et défait les ministères mais encourage les arts et l’on devrait dire « style Pompadour plutôt que style Louis XV ». Il en est de même pour l’infortunée Marie Antoinette.

Napoléon malgré son génie se méfie de la femme. Il dit à Madame de Staël qui lui demande quelle est la femme qu’il admire le plus « celle qui fait le plus d’enfants ». Il pense bien évidemment à sa mère. Le Code Civil réduit la femme à la minorité et cela pendant près de deux siècles.

Le XIXe siècle est celui de la révolution industrielle et des idéologies qui l’accompagnent. Siècle de contrastes, de progrès en matière scientifique, technique mais aussi d’éducation sous l’influence des ministres Durye sous le Second Empire et Jules Ferry en 1881.

Mais quelle régression, paupérisation propre au monde ouvrier, demi mondaines de la Belle Époque.

La femme oscille entre salon et cuisine, domesticité et usine.

Le premier baccalauréat  féminin a lieu sous le Second Empire, la première licence sous la IIIe République. La promotion sociale passe par le brevet élémentaire et l’accès au rôle d’institutrice, puis les premières infirmières qui remplacent lentement mais durablement les cornettes des religieuses.

La politique voit une Louise Michel, l’institutrice de la Commune, prôner l’éducation des classes populaires.

La guerre de 1914 ouvre les emplois masculins aux femmes: postes, transports, usines et travaux agricoles mais ne leur apporte pas leur émancipation. Celle-ci au début des années folles débute par le raccourcissement des jupes, on voit les mollets, les genoux découverts ne seront atteints que dans les années soixante et le charleston.

La seconde guerre mondiale et la résistance où les femmes sont les meilleurs agents de liaison où leur héroïsme soutient les combattants et leur abnégation dans les camps de concentration leur amène enfin à la libération un statut politique.

En 1945, elles ont le droit de vote, la sécurité sociale et notamment les caisses d’allocations familiales leur enlèvent un souci essentiel, celui d’élever correctement leurs enfants.

Il faudra attendre 1967 pour qu’elles puissent librement sans la permission de leurs maris avoir accès à un carnet de chèques à leur nom. Mais le combat est aujourd’hui loin d’être gagné.

La femme amante, la femme héroïque, la femme artiste, mécène mais aussi entrepreneure, scientifique telle Marie Curie, prix Nobel, philosophe Simone Weil, humanitaire Geneviève de Gaulle, Mère Térésa n’est-elle pas comme l’a su si bien dire en poésie et chanson Jean Ferrat :

« La femme est l’avenir de l’homme ».

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