L’ENGAGEMENT ASSOCIATIF

L’ ENGAGEMENT ASSOCIATIF

            Toutes les vertus se perdent dans l’intérêt comme un fleuve dans la mer.

            Cette maxime de La Rochefoucauld traduit le pessimisme de son auteur sur la condition humaine et oublie la gratuité de l’action.

            Certes, contrôler son ambition personnelle à d’autres fins que celle de son entourage ou de soi implique de nombreux renoncements et  sacrifices librement ressentis.

            Cette tentation humaniste de réfréner sa propre appartenance sans attente de reconnaissance et de bénéfices secondaires, voire accepter l’indifférence ou le mépris est difficile.

            L’être humain recherche une relation épanouissante, ce sentiment de l’utilité couplé à des résultats pérennes de la part de ceux que l’on aide, ces fruits si suaves du retour sur investissement.

            La sagesse implique un détachement d’une quelconque attente, le bien-fondé doit être vide de toute intentionnalité, le plaisir du don, la bonne conscience, l’assurance d’une réparation.

            Ne nous trompons pas, une affectation en résonnance avec notre propre vécu, des humiliations non cicatrisées engendrent une attitude narcissique de substitution qui sera vite mise à mal.

            Ce combat toujours à mener est celui de l’humilité, il nécessite un certain degré de considération, lutte contre nos peurs, nos dégoûts et nos aspirations personnelles. L’amour-propre peut en être affecté, la tranquillité menacée, certaines conduites réactiver de l’agressivité ou de la peur, proroger et accentuer un sentiment d’incomplétude.

            Alors notre liberté contrariée, surviendront lassitude et découragement. On appréhende la bonne distance, on craint dérive et manipulation, enfermement et résonance qui réveillent un mal-être, une culpabilité.

            Il importe de connaître nos limites, d’être soi sans chercher à jouer un rôle tout en maintenant des repères sans se laisser dominer ou envahir, porteur d’une autorité naturelle qui ne cherche ni à plaire ni à blesser mais témoigner de notre humanité.

De prime abord, l’engagement doit être mesuré puis l’on se laisse porter par la joie ressentie, accomplissement de ce que nous sommes. Le danger est l’emballement et le risque fusionnel.

            Le temps distrait n’est ni fuite dérobée à ses proches ni auto-satisfaction du devoir d’aide à son prochain. Craignons l’amertume qui éclot quand nous nous sentons contraints et parfois jaloux envers ceux qui ne se sentent pas concernés ni coupables et que l’on juge de façon péremptoire abandonniques.

            La vertu, éloignée de tout risque de perfection, nécessite une connaissance intime de soi, entre volonté et capacité, force de caractère et liberté d’implication. Elle est mise à mal par l’importance des attentes, les demandes incessantes.

            Ne nous laissons pas influencer, nos propositions doivent résonner avec nos envies, tout autant que les besoins, en aucun cas se subtiliser à l’absence.

             Alors, l’aphorisme de La Rochefoucauld n’aura plus de raison d’être.                                                                 

                                         Robert Mosnier Académicien 21ème fauteuil