Archives de catégorie : académie

Allocution du Président de l’Académie du Languedoc

Tout d’abord apprécions le plaisir de nous retrouver en ce lieu, pour notre séance solennelle.

Remercions tous ceux qui ont œuvré pour l’organiser et tout d’abord le Docteur Georges Méric, en tant que Président et ami, il nous accueille traditionnellement, mais après 3 ans d’interruption, son invitation nous a rassurés et réjouis.

Nous sommes donc réunis et je vous remercie tous pour votre présence en vos grades et qualités (Académiciens, lauréats, responsables, représentant et vous tous).

Notre perpétuel a comme toujours élaboré le programme pour promouvoir le patrimoine culturel du Languedoc,  honorer des lauréats et rappeler le souvenir de Languedociens.

Depuis 20 ans le Prix Pinel est remis rituellement lors de notre séance dans cet hôtel du Département.

Cette année il a été attribué au Pr Richman, nos routes se sont croisées au sein de ARTP (Association recherche des tumeurs de la prostate).

Ce programme médicalisé c’est aussi le prix Louis Lareng attribué au Pr Pouymayou, proposé et présenté par le Dr JL Ducassé (Louis ou Jean Louis sont des artisans, des professionnels du SAMU).

Je ne vais pas passer en revue tout le programme, vous le découvrirez et comme toujours, il faut veiller au temps sous le contrôle du Maitre des cérémonies ; le Dr Bénayoun.

Je vais après cet accueil qui fut un plaisir et une politesse, continuer par un honneur, celui de faire l’Eloge d’un Académicien titularisé ; le Maitre Sébastien Langloys, qui va nous rejoindre avec le maitre du Barreau : Bernard Poulhies.

Henri COUSSE (9ème fauteuil)
Président de l’Académie du Languedoc

Séance solennelle du 29 avril 2022 au Conseil départemental de la Haute-Garonne

Le meurtre du 15 août

Cliquer ci-dessous pour obtenir la quatrième de couverture (CV de l’auteur et résumé) de l’ouvrage « Le Meurtre du 15 août… » par Jean-Claude Escalette.

Quatrième de couverture

Il s’agit d’une publication Arts et histoire.

L’ouvrage est hors commerce et se trouve chez l’auteur au tarif de
20 € franco de port.

Pour les Académiciens et Membres associés, l’auteur peut faire une dédicace.  Contact avec l’auteur :

artsethistoire@wanadoo.fr

 

Mozart : « La Flûte enchantée »

   « La Flûte enchantée »

Communication de Maryse Carrier

 « La Flûte enchantée » (« Die Zauberflöte » en allemand), ultime chef-d’œuvre de Mozart, au succès jamais démenti, fut créé à Vienne le 30 septembre 1791, durant une période particulièrement difficile pour le compositeur : problèmes de santé (il décèdera le 5 décembre 1791 à l’âge de 35 ans), difficultés financières, perte de son génial librettiste Lorenzo da Ponte… C’est avec enthousiasme qu’il accepta alors la proposition de son ami chanteur, directeur d’un théâtre à Vienne (Theater auf der Wieden), Emanuel Schikaneder : composer un « opéra populaire » inspiré d’un conte oriental, un Singspiel (alternant chants et dialogues parlés), proche de l’opéra comique français.
Dans la première scène de cet opéra, dont l’action se déroule dans une Egypte imaginaire, un jeune prince, Tamino, est aux prises avec un « serpent maléfique » ; il s’évanouit et sera sauvé par trois Dames qui vont abattre le monstre. Lorsque Tamino reprend ses esprits, il voit s’approcher un personnage truculent, volubile et même un peu fruste, l’oiseleur Papageno, qui se vante d’avoir lui-même tué le serpent ! Il sera puni par les 3 Dames qui poseront un cadenas sur sa bouche, car diront-elles, un tel cadenas sur la bouche des menteurs ferait régner partout «amour et fraternité » à la place « du fiel, de la calomnie et de la haine » ! En fait Mozart ici règle ses comptes avec le Clergé et la Cour de l’Empereur autrichien réactionnaire Léopold II, qui par la calomnie et des mensonges se sont opposés à « L’Enlèvement au sérail », « les Noces de Figaro » et bien sûr « La Flûte enchantée », ces 3 opéras défendant respectivement les principes de la Liberté, de l’Egalité et de la Fraternité (thème majeur du dernier opéra) ! Notre devise républicaine, qui aurait été initiée par les francs-maçons et qui deviendra la leur en 1848 transparaît donc à travers trois opéras de Mozart ! (Précisons que la franc-maçonnerie, dont le berceau présumé serait l’Egypte, et venue d’Angleterre au 18ème siècle, s’est répandue très vite dans toute l’Europe et qu’elle avait le vent en poupe sous le règne de l’empereur d’Autriche Joseph II (frère et prédécesseur de Léopold II), protecteur de Mozart qui comme son librettiste Schikaneder fréquentait des loges maçonniques. Léopold II par contre, convaincu de la responsabilité de la franc-maçonnerie lors de la Révolution française de 1789, tiendra Mozart à distance.)
Et voici qu’apparaît sur son trône étoilé, la Reine de la Nuit : dans une magnifique aria, la Reine promet à Tamino la main de sa fille Pamina (dont le jeune homme s’est follement épris à la seule vue du portrait apporté par les trois Dames !), à condition que ce dernier la délivre du « scélérat », du « démon », du tyran » qui a osé l’enlever à sa mère, à savoir un certain Sarastro. Il est évident que ce nom fait référence à Zarasthustra, réformateur religieux iranien (en partie légendaire) du 7ème siècle avant notre ère, qui professa le mazdéisme (du dieu Ahura Mazda), religion monothéiste reposant sur les 2 principes du Bien et du Mal, dualisme régissant l’humanité entière.
Tamino va recevoir ensuite une « flûte d’or » et Papageno « des clochettes d’argent », instruments magiques aux pouvoirs surnaturels, grâce auxquels ils pourront par exemple dans le domaine de Sarastro charmer des animaux sauvages et neutraliser des esclaves menaçants armés de chaînes : ces instruments de musique font en effet régner « l’harmonie universelle », c’est-à-dire une fraternité universelle, sans laquelle « il n’est nul bonheur sur terre ».
En outre trois jeunes garçons « beaux, gracieux et sages » guideront les deux jeunes gens jusqu’au château (où le Maure Monostatos, le chef des esclaves, poursuit Pamina de ses assiduités) et sur un rythme ternaire ils conseilleront à Tamino d’être « ferme, patient et discret ». Il ne peut pas nous échapper à quel point le chiffre trois, chiffre maçonnique, symbole d’équilibre et d’harmonie, est présent dans cet opéra, tel un véritable leitmotiv.
A la fin du premier acte, Sarastro fait conduire les deux jeunes gens « dans le temple des épreuves, tête voilée, pour y être purifiés.»
Dans l’acte Il le rideau s’ouvre sur le temple de la Sagesse, où se déroule l’Assemblée solennelle des Prêtres, « serviteurs des dieux égyptiens Isis et Osiris », ces dieux dont certains philosophes francs-maçons, épris d’égyptomanie, tentent au 18ème siècle de réinventer les mystères. Sarastro, qui se présente ici tel le « Vénérable » d’une loge maçonnique lors d’une « Tenue », c’est-à-dire une réunion d’Initiés, évoque à présent l’initiation de Tamino, qui veut « déchirer les ténèbres qui voilent son regard pour apercevoir la lumière suprême ». Mais pour cela il va devoir affronter des épreuves dangereuses, pour lesquelles il aura besoin du soutien des prêtres, qui l’aideront sur le chemin de la Connaissance. Elèves, prêtres, Grand Prêtre, tout ceci rappelant les trois grades des loges maçonniques : apprenti, compagnon et Maître.
Le parcours initiatique des deux jeunes gens, inspiré des rites maçonniques, débutera (comme pour « l’apprenti ») par l’épreuve du silence : l’oiseleur, qui n’en a cure, va multiplier ses pitreries, animé uniquement du désir « de dormir, boire, manger et de mettre un jour la main sur une jolie petite femme… une tourterelle !
Tamino par contre se soumettra en élève modèle à cette épreuve, malgré le risque de plonger un jour Pamina dans un profond désespoir, car il ne répondra pas à ses questions. Persuadée qu’il ne l’aime plus, dans une magnifique aria exprimant une émouvante douleur élégiaque, Pamina envisagera même la mort libératrice comme la seule issue à ses tourments.
En fait Pamina dans un autre registre subit elle aussi une série d’épreuves : le mutisme inexplicable de Tamino, les assiduités insupportables de Monostatos qui veut toujours assouvir sa passion malsaine pour elle, mais auquel Mozart toutefois a attribué de sincères sentiments humains. Et elle devra également affronter le courroux de sa mère, la Reine de la Nuit, dont la voix explose dans un air mondialement connu de haine et de vengeance, avec Fa suraigus, spectaculaires arpèges lancées jusqu’au contre-fa, périlleux triolets, que quelques sopranos seulement parviennent à chanter ; cette Reine au bord de la folie, ne se maîtrisant plus, demande en effet à sa fille de tuer Sarastro et de lui rendre le « puissant cercle solaire aux 7 auréoles » que Sarastro porte sur sa poitrine. Car le mari de la Reine, le père de Pamina, le prédécesseur de Sarastro, a légué à Sarastro et non à elle, son épouse, ce fameux instrument du pouvoir, dont elle s’estime frustrée : « Si Sarastro ne succombe pas de ta main… tu ne seras plus ma fille… Ecoutez, dieux vengeurs ! Ecoutez le serment d’une mère ! » s’écrie-t-elle à la fin.
Dans une célèbre réponse, Sarastro (remarquable voix de basse), prônant le pardon, le triomphe de l’amour sur l’esprit de haine et de vengeance, explique à Pamina qu’il sait tout sur les intentions et les sentiments de la Reine.
Or ces deux passages, les imprécations de la Reine et la réponse de Sarasto (couple ô combien antagoniste !) constituent le nœud central de toute l’œuvre : la Reine de la Nuit, dont le nom à lui seul évoque les ténèbres, symbolise l’ignorance, les préjugés, les mensonges, l’obscurantisme ; mais dans ses excès, sa passion dévastatrice, elle est également la représentante du « Sturm un Drang » (« Assaut et Tempête »), un courant du 18ème siècle, précurseur du romantisme allemand, qui s’opposait au courant précédent, appelé « Aufklärung » ou Philosophie des Lumières, dont Mozart était un adepte. Et Sarastro, le Grand Prêtre de la Lumière, donc de la connaissance, de la vérité, de la sagesse, qui va jusqu’à pardonner à ses ennemis, n’est donc pas « le démon puissant et maléfique » décrit par la Reine, mais il évoque par maints aspects le « despote éclairé », tolérant, généreux, affirmant que « la sagesse et la raison vaincront ».
Malgré le fait qu’il séquestre Pamina, qu’il a enlevée, malgré la présence d’esclaves dans son domaine et son apparent mépris des Noirs, qu’il peut même faire fouetter, malgré quelques propos misogynes, il est bien le représentant des idées propagées par tous les philosophes du siècle des Lumières (Montesquieu, Diderot et d’Alembert, Rousseau, Voltaire…), avec souvent leurs contradictions… D’autre part nous savons que la plupart de ces philosophes, écrivains, ainsi que des hommes politiques, comme d’ailleurs une grande partie de l’intelligentsia européenne dite « éclairée » du 18ème siècle, furent très influencés par les idéaux de la franc-maçonnerie.
En tout cas et pour le plus grand bonheur de Mozart, ce fameux « Air de Sarastro » était chanté régulièrement dans la loge maçonnique de « l’Espérance couronnée » que le compositeur a fréquentée à la fin de sa vie après celle de la « Bienfaisance ».
Ce deuxième acte se termine sur un grand Finale composé de 5 remarquables tableaux :
Dans le premier, l’intervention providentielle des trois Garçons empêche Pamina de se suicider.
Dans le second sont évoquées la victoire sur la peur de la mort et la purification par les quatre éléments (feu, eau, air, terre : fameux quaternaire maçonnique) – mais nous n’en verrons que deux. Et voici Pamina, magnifique Pamina, qui va à présent remplacer Papageno, ravi de laisser sa place : elle veut en effet rester à côte de Tamino, pour affronter les deux dernières épreuves, les plus dangereuses, les épreuves du feu et de l‘eau, et surtout pour le « guider », faisant d’elle une femme étonnamment moderne, courageuse, « digne d’être initiée » précisent Tamino et les maitres d’armes !
Mozart, qui prônait l’ère de la franc-maçonnerie mixte, adresse en fait ici indirectement et audacieusement une critique à tous ceux qui s’opposaient à l’égalité de l’homme et de la femme, à savoir l’Eglise, la Cour, la Franc-maçonnerie, la société en général… cette problématique trouvant un écho certain au sein de la société actuelle…
« Joue de ta flûte enchantée » dit ensuite Pamina à Tamino, « qu’elle nous protège sur notre route !», ajoutant : « Par la magie de la musique, nous traversons sans peur les ténèbres de la mort !», ce qui signifie que la flûte est magique et non enchantée, car elle ne subit pas l’enchantement, elle le crée. Et c’est bien cette flûte que l’on entendra durant la traversée des épreuves, sachant que dans tout cet opéra l’orchestration – fait unique dans l’histoire de l’opéra – a privilégié les instruments à vent (surtout clarinettes, cors de basset et solennels trombones), traditionnellement associés aux rituels maçonniques.
Les épreuves symboliques du feu et de l’eau, destinées à conduire le futur couple vers la Connaissance et la Lumière des Initiés, ayant été brillamment franchies, un chœur triomphal célèbre leur victoire : « Vous avez triomphé du danger ! Vous êtes initiés aux rites d’Isis ! Venez, pénétrez dans le temple !»
Le troisième tableau nous permet de retrouver Papageno, sauvé in extremis du suicide par les trois Garçons : il avait été en effet séparé de son être cher, Papagena, car un officiant lui avait dit qu’il n’était « pas encore digne d’elle » ! Mais voici le double féminin de l’homme-oiseau qui réapparaît, ce qui donne lieu au célèbre duo du bégaiement aux comiques onomatopées, tous les deux envisageant déjà la « ribambelle » de petits Papageno et Papagena qu’ils vont se mettre à fabriquer tout de suite !
Nous saisissons bien ici que ce couple « populaire », destiné à plaire à un large public par son caractère naturel, spontané, par son côté un peu « commedia dell’arte », est destiné aussi à alléger l’atmosphère entre des scènes parfois tendues, comme ce fut le cas précédemment et avant la suivante.
Dans le quatrième tableau, la Reine de la Nuit, les trois Dames et Monostatos vont être engloutis dans les ténèbres éternelles alors que, tels des conspirateurs, ils s’étaient introduits furtivement dans le temple pour massacrer tous ses occupants.
Et dans le cinquième et dernier tableau Sarastro proclame en ces termes la victoire du Bien sur le Mal : « Victoire du soleil sur la nuit et fin des imposteurs » tandis que le chœur flamboyant des Prêtres célèbre la force morale, la sagesse et la beauté du couple noble et élu, digne représentant du plus bel « opera seria », destiné à succéder à Sarastro et à régner sur le royaume de la Lumière, qui sera repeuplé par Papageno et Papagena….

Admirée par Goethe et Beethoven, « la Flûte enchantée », à la fois comédie populaire et conte initiatique, testament philosophique et spirituel de Mozart, testament maçonnique, atteint au grandiose grâce à sa musique qui sublime un livret parfois énigmatique, voire ésotérique. Or cette musique est un « cas unique dans l’histoire de l’opéra », Mozart créant un nouveau genre d’opéra allemand, en juxtaposant la musique populaire viennoise, le Singspiel, avec les accents nobles et grandioses de « l’opera seria » et les vocalises les plus acrobatiques du « bel canto » italien.
Et grâce à ce mélange des genres le compositeur a su rendre attrayants et accessibles au plus grand nombre « le message élevé de la philosophie des Lumières » et tous les messages qui lui tenaient à cœur la veille de sa disparition, cette comédie populaire étant visiblement et surtout destinée à adresser un appel vibrant à l’humanité en vue de l’édification d’un monde meilleur.

Toulouse, le 18 janvier 2022

Déodat de Séverac

COMMUNICATION DE L’ACADEMICIEN JEAN-JACQUES CUBAYNES

PAR LE DR JEAN-FRANCOIS GOURDOU SECRETAIRE PERPETUEL

J’ai l’honneur de vous présenter le compte rendu de la communication de Jean-Jacques Cubaynes sur le musicien Déodat de Séverac, donnée le mardi 19octobre 2021à l’Hôtel Grand Plaza lors de notre réunion mensuelle.

Jean-Jacques Cubaynes a évoqué avec éloquence et passion Déodat de Séverac avec sa vie, ses œuvres musicales et son Festival.

LE PRIX DE MUSIQUE DE L’ACADEMIE DU LANGUEDOC

Le nom de Déodat de Séverac avait été choisi pour le premier prix de musique de l’Académie du Languedoc dès la création de celle-ci en 1964. Depuis ce prix a été décerné chaque année à Paris et à Toulouse, ce qui fait donc maintenant plus de 50 ans. Ainsi il a été décerné à plus de 50 musiciens régionaux devenus Lauréats de notre Académie du Languedoc. Il avait été choisi car bien sûr il était un grand languedocien de naissance, de cœur et de musique mais en plus il avait participé à la fin du XIXe siècle à l’Association des Toulousains de Paris, dont est issue l’Académie du Languedoc.

SA JEUNESSE

Déodat de Séverac est né le 20 juillet 1872 dans l’ancienne demeure familiale de la place de Saint-Félix-Lauragais. Sa famille était de vielle noblesse remontant aux Seigneurs de Séverac le Château dans l’Aveyron. Puis elle s’installa à Saint- Félix du Lauragais, ainsi ses parents y résidaient. Son père fut un peintre célèbre, celui-ci avait fait réaliser pour peindre un magnifique atelier avec une grande verrière dans les toits de la maison. Déodat de Séverac y passa toute son enfance et son adolescence, puis il y revint de temps à autre par la suite.

Déodat de Séverac après ses études à l’école de Soréze et à Toulouse dont au conservatoire,   montera à Paris suivre une formation musicale à la « Schola Cantorum », devenant l’élève de musiciens célèbres dont Vincent d’Andy et Albéric Magnard. Il deviendra ainsi un pianiste chevronné mais aussi un brillant organiste assistant d’Isaac Albéniz et d’Alexandre Guilmant.

En 1907 il passa sa thèse musicale de fin d’études à la « Schola Cantorum » Sur le« Centralisme musical et les petites chapelles musicales » dénonçant le centralisme parisien musical, faisant disparaitre les musiques régionales qu’il se disposait à faire revivre.

Aussi très tôt il se lassera de la vie parisienne et il se retirera en 1910 à 38 ans dans le Sud de la France en se fixant  dans la ville de Céret au-dessus de Perpignan dans les Pyrénées-Orientales. Cette ville au doux climat était en effet déjà célèbre accueillant de nombreux artistes peintres et musiciens.

SES ŒUVRES

 Déodat de Séverac fut un grand musicien compositeur et sera l’auteur de nombreuses compositions musicales classiques qui deviendront célèbres mettant en musique des thèmes champêtres de son enfance sur ses terres du Lauragais mais aussi de nombreuses mélodies occitanes et même catalanes.

Il composera alors des musiques pour le théâtre dont « Le Cœur du Moulin » qui sera joué à l’opéra-comique de Paris le 8 décembre 1909 et « Héliogabale » tragédie lyrique en 3 actes sur un poème de Emile Sicard créé au théâtre des arènes de Béziers en 1910.

Il est aussi surtout très connu par ses œuvres pour piano comme « Le champ de la terre » en 1900, idylle rustique de la campagne mais encore les œuvres « En Languedoc » en 1904 et « Baigneuses au soleil » en 1908.

Il composa encore « Les Naïades » et « Le Faune indiscret » en 1908 et « En  Vacances » en 1911, enfin « Cerdana » son chef-d’œuvre à la gloire de la Catalogne en 1904 et 1911.

Il fut aussi l’auteur d’un chant catalan « Cant Vallespir » et de plusieurs mélodies dont « A l’Aube dans la Montagne » 1906 et « Flors d’Occitanisa »en 1912.

Il composera encore des œuvres pour orgue dont « Suite en Mi », « Petite suite scholastique » et « Cinq Versets d’orgues ».

Aussi il devint un musicien national et international très célèbre mais aussi, en admirateur de Frédéric Mistral,  un musicien  régional dit du Sud-Ouest, un musicien paysan du terroir et de la nature du Lauragais de son enfance et ensuite de la Catalogne.

SON DECES

Malheureusement Déodat de Séverac, malade d’une urémie, mourut jeune le 25 mai 1921 soit à 48 ans dans la maison où il habitait à Céret. Toutefois il fut enterré en grande pompe dans le caveau familial de  Saint-Félix-Lauragais et depuis, un buste a  été inauguré devant  les remparts du château de Saint-Félix perpétuant son souvenir.

ACTUELLEMENT

La maison natale de Déodat de Séverac à Saint-Félix-Lauragais est devenue un musée conservant pratiquement tout le mobilier, les tableaux, les photographies de famille et les meubles de l’époque, dont le piano de Déodat de Séverac avec les plumes d’oies pour écrire ses partitions. Cette maison est toujours la propriété de la famille qui la  fait visiter sur rendez-vous. Le festival Déodat de Séverac a été fondé en 1989 par son petit-fils Gilbert Blacque-Belair et son épouse. Depuis 1994 Jean-Jacques Cubaynes préside le Festival Déodat de Séverac. La ville de Toulouse conserve aussi de nombreuses archives et a réalisé plusieurs expositions. Depuis le disque a largement diffusé la musique de Déodat de Séverac.

 Jean-Jacques Cubaynes et la famille de Déodat de Séverac dont maintenant son arrière-petite-fille, organisent chaque année les Estivales avec une série de concerts musicaux à Saint- Félix dans la cour du château médiéval du village ou dans la superbe église gothique ou encore dans l’abbaye de Soréze et dans des demeures des environs. Chaque année j’ai eu le plaisir d’y assister avec quelques académiciens. L’été dernier le 6 aout 2021 avant les trois jours de concerts du centenaire de la mort de Déodat de Séverac une plaque commémorative a été fixée sur la façade de sa maison natale. C’est Jean-Jacques Cubaynes qui a prononcé le discours inaugural. Il y a aussi des Automnales avec encore des concerts et des conférences.

Jean-Jacques Cubaynes entretien ainsi la mémoire musicale de Déodat de Séverac avec beaucoup de brio et d’actions. Il nous fait chaque année apprécier les œuvres de Déodat de Séverac pour piano mais aussi ses œuvres pour orgue et ses mélodies merveilleuses.

Grand merci à Jean-Jacques Cubaynes pour cette belle et grande évocation de notre grand musicien Déodat de Séverac, parrain musical de notre Académie du Languedoc.Venez nombreux l’été prochain au festival Déodat de Séverac 2022.

DR JF GOURDOU

L’ENGAGEMENT ASSOCIATIF

L’ ENGAGEMENT ASSOCIATIF

            Toutes les vertus se perdent dans l’intérêt comme un fleuve dans la mer.

            Cette maxime de La Rochefoucauld traduit le pessimisme de son auteur sur la condition humaine et oublie la gratuité de l’action.

            Certes, contrôler son ambition personnelle à d’autres fins que celle de son entourage ou de soi implique de nombreux renoncements et  sacrifices librement ressentis.

            Cette tentation humaniste de réfréner sa propre appartenance sans attente de reconnaissance et de bénéfices secondaires, voire accepter l’indifférence ou le mépris est difficile.

            L’être humain recherche une relation épanouissante, ce sentiment de l’utilité couplé à des résultats pérennes de la part de ceux que l’on aide, ces fruits si suaves du retour sur investissement.

            La sagesse implique un détachement d’une quelconque attente, le bien-fondé doit être vide de toute intentionnalité, le plaisir du don, la bonne conscience, l’assurance d’une réparation.

            Ne nous trompons pas, une affectation en résonnance avec notre propre vécu, des humiliations non cicatrisées engendrent une attitude narcissique de substitution qui sera vite mise à mal.

            Ce combat toujours à mener est celui de l’humilité, il nécessite un certain degré de considération, lutte contre nos peurs, nos dégoûts et nos aspirations personnelles. L’amour-propre peut en être affecté, la tranquillité menacée, certaines conduites réactiver de l’agressivité ou de la peur, proroger et accentuer un sentiment d’incomplétude.

            Alors notre liberté contrariée, surviendront lassitude et découragement. On appréhende la bonne distance, on craint dérive et manipulation, enfermement et résonance qui réveillent un mal-être, une culpabilité.

            Il importe de connaître nos limites, d’être soi sans chercher à jouer un rôle tout en maintenant des repères sans se laisser dominer ou envahir, porteur d’une autorité naturelle qui ne cherche ni à plaire ni à blesser mais témoigner de notre humanité.

De prime abord, l’engagement doit être mesuré puis l’on se laisse porter par la joie ressentie, accomplissement de ce que nous sommes. Le danger est l’emballement et le risque fusionnel.

            Le temps distrait n’est ni fuite dérobée à ses proches ni auto-satisfaction du devoir d’aide à son prochain. Craignons l’amertume qui éclot quand nous nous sentons contraints et parfois jaloux envers ceux qui ne se sentent pas concernés ni coupables et que l’on juge de façon péremptoire abandonniques.

            La vertu, éloignée de tout risque de perfection, nécessite une connaissance intime de soi, entre volonté et capacité, force de caractère et liberté d’implication. Elle est mise à mal par l’importance des attentes, les demandes incessantes.

            Ne nous laissons pas influencer, nos propositions doivent résonner avec nos envies, tout autant que les besoins, en aucun cas se subtiliser à l’absence.

             Alors, l’aphorisme de La Rochefoucauld n’aura plus de raison d’être.                                                                 

                                         Robert Mosnier Académicien 21ème fauteuil

SAINT EXUPERE

SAINT EXUPERE

A l’angle de la rue Lamarck (11) (nom de rue directement lié au Jardin des Plantes),  l’église Saint Exupère, ancienne église des Carmes Déchaussés, a conservé son cadre ; elle surprend par son parvis enclos de murs, une réminiscence du passé.

La façade, austère, ne laisse pas deviner les richesses qui, à l’intérieur de l’église, impressionnent le pèlerin.

Son tympan s’orne d’une sculpture, un marbre de 1663, qui représente Saint- Joseph et l’enfant Jésus.

Une plaque gravée rappelle que l’église a été rénovée en 2007 et que cette restauration a été officiellement célébrée le 22 décembre.

Les « Carmes Déchaux » ou ‘Déchaussés’, appartiennent à un ordre mendiant, ils ont donc fait vœu de pauvreté, ils vont ‘pieds nus’ dans de simples sandales.

Ils sont présents à Toulouse dès le 13ème siècle, s’installent hors les murs au Férétra d’abord, ensuite dans la Cité : place des Carmes, enfin de nouveau hors les murs. Ils fondent un couvent devant la porte Montgaillard, sur les sites du Théâtre Sorano, du Muséum et du Jardin des Plantes actuels : 1562-1568.

Les « Carmes Déchaux » sont issus de la réforme du Carmel de Saint-Jean de la Croix et de Sainte-Thérèse d’Avila au 16ème siècle.

Ils édifient d’abord un oratoire 1623, puis une chapelle dédiée à Saint-Joseph. La construction s’avère très vite trop exigüe. Les Carmes bâtissent alors un sanctuaire consacré le 25 mars 1665 qui deviendra l’église Saint Exupère.

-La Révolution, en 1793, transforme les locaux du couvent en école de botanique, Muséum d’Histoire Naturelle d’aujourd’hui. L’église quant à elle, devient abattoir de ‘cochons’ et préparation de viande salée pour la Marine.

Après la signature du ‘Concordat’ de 1805, l’église est rendue au culte : décret impérial du 9 avril 1806.

Le 2 janvier 1807, l’Archevêque de Toulouse la transforme en église paroissiale. Ce n’est qu’en 1846 qu’elle accède au statut « d’église de paroisse autonome sous le vocable de Saint Exupère ».

Enfin, en 1993, ce sont les Religieux Assomptionnistes qui reçoivent la charge pastorale de la Paroisse.

*Saint Exupère, évêque, décédé à Blagnac en 417.

C’est une grande figure de l’épiscopat local dans les débuts du « christianisme » à Toulouse. Il succède à Saint-Sylve, prélat éminent, et poursuit la construction de la ‘1ère basilique Saint-Sernin’ que celui-ci avait initiée. Il y fait transférer les reliques du ‘saint martyr’.

Il jouit dans tout l’Empire Romain d’une grande renommée ; il est loué pour sa sagesse.

En 407-408, « …il se dresse contre l’invasion vandale… »Ph. Wolf.

Il a sauvé Toulouse.

L’atmosphère de l’église inspire calme et sérénité.

La simplicité de son architecture : nef et chœur d’un seul tenant, tranche avec la beauté et la richesse de toutes ses composantes, tableaux, sculptures, boiseries, décors, composition qui lui confèrent un remarquable caractère.

La décoration est de style baroque ; les ‘gypseries’ du 17ème siècle, d’une grande finesse, qui entourent 8 beaux vitraux, et les 19 tableaux de la nef invitent à la contemplation. La voûte du chœur, à caissons de bois peints, reste du plus heureux effet. 

Jacques-Pascal Virebent(12) a transformé le chœur en 1807, les stalles sont en noyer ; au-dessus de la galerie supportée par 4 colonnes de marbre rouge, on remarque « La Gloire » et son triangle symbole de la Trinité.

Derrière l’autel de style Louis XVI, se détache un christ du 17ème siècle en bois sculpté, il s’accompagne de deux statues en bois doré : Saint Bertrand et Sainte Rose de Lima.

Dans la nef, 10 grands tableaux du peintre toulousain Despax(13) forment la galerie des prophètes.

A l’entrée, la tribune de l’orgue a été dessinée par Auguste Virebent (le fils). Un orgue magnifique à 4 tourelles, orné d’angelots musiciens, a été créé en 1850 par Théodore et Maurice Puget, facteurs d’orgue réputés. Il se compose de 27 jeux sur 3 claviers et compte 1500 tuyaux.

Enfin, sur le côté droit de la nef sont situées les chapelles de Saint-Joseph et de Notre-Dame de la Salette, et sur la gauche la chapelle Saint-Roch et les fonds baptismaux.

Depuis le Jardin des Plantes, la vue sur le clocher octogonal, haut de 35 mètres, permet d’en apprécier la qualité. Il renferme un carillon de 14 cloches, à la musicalité très agréable, qui marque le temps pour les promeneurs des jardins et les habitants du quartier. Il est de style gothique.

En bordure du Quai des Savoirs, sous la croix, le monument aux morts, (de la Guerre de 14-18 et de tous les conflits du 20ème siècle), dédié aux enfants du Busca, de Saint-Michel et du Port Garaud, s’inscrit, en harmonie, dans le cadre de l’église Saint Exupère.

Serge LEMAIRE – Académicien 30ème fauteuil

 

(10) Villepinte, dans l’Aude, commune toute proche de Carcassonne.

(11) La rue Lamarck, c’est l’ancienne rue du Cocq, ou encore du Jardin des Plantes ; le 12 mai 1886 le Conseil Municipal la baptise : « rue Jean Baptiste de Monet, Chevalier de Lamarck », né en Picardie et  mort à Paris en 1829. Ce passionné de botanique, professeur de zoologie en 1793, auteur d’ouvrages, était le « père » de la théorie du Lamarckisme, base du « Transformisme ».

(12)Jacques-Pascal Virebent, né et mort à Toulouse 1746-1831, était l’Architecte de la Ville de Toulouse. On lui doit l’architecture et le dessin de la Place Wilson, les Arcades et la Place du Capitole, les Boulevards et Allées Jean Jaurès. Il reste le fondateur d’une lignée d’architectes et fabricants d’ornements architecturaux. Les « ateliers » Virebent à Launaguet sont demeurés célèbres jusqu’au 20ème siècle (ils ont fermé en 1960).

(13) Jean-Baptiste Despax, né et mort à Toulouse 1710-1773, avait été l’élève d’Antoine Rivals dont il a épousé la fille. Membre de l’Académie de peinture, sculpture et architecture de Toulouse dès sa création en 1750, il en a été aussi l’un des professeurs.

Il a beaucoup travaillé pour sa Ville : chapelle des Carmélites, chapelle de la Visitation, église Saint Exupère. Il est réputé pour avoir été le « Maître du baroque occitan ».