Hommage au Doyen Chanal – Le 28 Novembre 2023
par le Docteur Michel Monsarrat (56ème fauteuil)
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Madame la Sénatrice
Mesdames, Messieurs le Académiciennes et Académiciens
Mesdames, Messieurs
Nous sommes ici dans ce haut lieu de l’histoire de notre pays à l’invitation de Madame Micouleau Sénatrice de la Haute Garonne, que je remercie vivement pour l’honneur qu’elle nous fait. Mes remerciements vont bien entendu très cordialement à notre Président, Monsieur Henri Cousse, à Monsieur le Secrétaire Perpétuel JF Gourdou et bien sûr à tous les Membres du bureau.
Au moment de lui succéder, rendre hommage à Monsieur Jean Louis Chanal est un privilège.
Je vais tenter avec ma meilleure inexpérience de vous dire en quelques minutes, au-delà des réalités incontournables, ma perception toute personnelle de l’événement et de l’honneur qui m’est offert de prendre pareille succession.
Monsieur, ce 56ème fauteuil vous était attribué en 1999 à la suite de Monsieur Hubert Barbe, Montpelliérain d’adoption. Cette « veine » se prolonge virtuellement, par mon entremise, puisque mon père a fait la plus grande partie de ses études de pharmacie à Montpellier, je suis donc ainsi ce jour devant l’agréable mission de rappeler l’exceptionnelle densité de votre vie.
Vous avez fait, Monsieur, vos études de pharmacie à Montpellier, vous êtes titulaire
- D’un DESS de physique,
- Licencié en sciences,
- Titulaire d’un Doctorat universitaire de pharmacie,
- Professeur à la Faculté,
- Doyen de la Faculté de pharmacie, directeur de l’UFR des sciences pharmaceutiques et Biologiques.
- Directeur de l’institut Universitaire professionnalisé d’ingénierie de la santé.
- Expert en pharmacocinétique
- Vice-Président du conseil des études et de la vie Universitaire
- Chargé de mission pour la conférence des Doyens
- Administrateur du Musée de la pharmacie à Montpellier
- Vous avez reçu le prix Hebrard en 1968
- Vous êtes Chevalier des Palmes Académiques depuis 1976 et
- Officier dans le même Ordre depuis 1981.
Revenant à des considérations personnelles et donc subjectives, comme je vous l’indiquais, j’ai eu par mon père, une attache très affective avec la Faculté de pharmacie de Montpellier, dont il n’a cessé sa vie durant, de clamer les grandes vertus : la plus « Noble », la plus connue, la plus « reconnue », elle était alors la plus ancienne et donc, bien sûr, tout porte à croire qu’elle l’est restée !
Il y avait, très proche, un jardin botanique exceptionnel et tout autour une ville superbe, éclairée par un soleil éternel !…
Les moments de sa vie rattachés à cette légende Montpelliéraine sont inscrits et brillent encore dans ma mémoire.
Il y avait donc ce lieu de « souvenirs » totalement inaccessibles, car si magnifiques et lointains. Il y avait donc ce lieu « improbable », selon la terminologie actuelle et le reste du monde, dont nous faisions presque partie et que mon père avait dû sans doute, adopter un peu malgré lui et sans retour !…
En effet, poussé par des voies, des canaux moins scientifiques, mon père avait conclu un pacte d’Amour avec une étudiante en pharmacie Toulousaine et j’étais c’est incontournable, un des futurs maillons de ce pacte…
Ma jeunesse s’est inscrite dans les méandres et les mystères de la pharmacie où mes parents avaient établi le futur de leur vie, dont à l’évidence je tenais déjà une part importante.
Ainsi devait m’accompagner jusqu’à ce jour, le souvenir du parfum, des odeurs des « simples » ces médicaments d’avant la chimie, d’avant les laboratoires, d’avant même l’Ecologie !…
Devaient également m’intriguer ces endroits secrets, presque interdits où s’ouvraient des tiroirs immenses où s’impatientaient des petites boîtes aux noms circonspects et leurs trésors nouveaux ; « les SPECIALITES », ces « médications » que seuls les docteurs en médecine pouvaient ordonner, tant leur « cherté », leur dangerosité, leur spécificité exposaient potentiellement à des déconvenues, plus à des catastrophes voire même à des représailles devant les tribunaux !
Nous touchions là aux travaux à venir du Professeur Chanal en pharmacocinétique.
Et c’est ainsi que peut-être, très inconsciemment, trahissant l’Officine et ses grandeurs, je m’orientais naïvement vers ceux, les « Prescripteurs » qui devenaient en quelques sortes des Chevaliers, les Aventuriers des temps modernes…
Quelques années plus tard, au prix des tribulations Universitaires en vigueur, je devenais Médecin et pire encore : Chirurgien.
Depuis, le temps est passé avec lui, la vie, la si belle vie s’est « augmentée » : L’Amour, Régine, ma très chère épouse à qui je dois tant… presque tout, nos enfants, nos petits-enfants…
Avec la vie, passe aussi la gomme du temps, celle qui efface, qui supprime : amis, grands-parents, parents… Celle qui fait grandir, puis vieillir et même parfois, dans quelques cas, mourir.
Mais cela ne concerne qu’un petit nombre d’entre nous…
Ensuite comme l’a si bien dit mon parrain Henri Cousse, après la chirurgie, j’ai mal « tourné », je me suis mis à écrire, à peindre, je suis même entré « en politique », suprême altération de l’âme.
Depuis, mon cerveau à même creusé des trous et nous voici ce jour à cheval, entre le dit et le non-dit, entre l’être et le néant, des trous de vie, du temps passé, de mémoire éteinte qui sont autant de médailles parfois superbes, que le hasard vieilli offre à un futur de plus en plus illusoirement incandescent. Fort heureusement vous me donnez la possibilité de prendre un peu de repos dans ce 56ème fauteuil.
C’est ainsi, Monsieur, que j’adresse à votre présence virtuelle, l’hommage que mes parents vous auraient sans doute servi, avec plus d’authenticité. Néanmoins, comme mon parrain l’a très généreusement évoqué, j’y ajoute cette part d’irrationnel que le destin m’a confié : poétique en mots et en images.
Le poète et le peintre assortis d’un ancien chef de service en chirurgie des Hôpitaux, d’un ancien élu de Castres, du Tarn et de Midi Pyrénées qui vous parle avec ses mots et son cœur, avec l’espoir d’être un futur et digne successeur de ce 56ème fauteuil et d’y incarner le fruit d’une histoire « commune » qu’il nous est donné de partager, une histoire où les hasards et les destins se croisent et se rejoignent avec leurs précautions, leurs illusions, leurs fantaisies et surtout : leur autorité céleste.
Michel Monsarrat